Gaza et le Hamas : Rétablir la vérité, par Henry Siegman

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drÖne
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Gaza et le Hamas : Rétablir la vérité, par Henry Siegman
24 janvier 2009

Henri Siegman, ancien directeur de l’American Jewish Congress, conteste la version israélienne des évènements qui ont précédé le conflit de Gaza, communément reprise par les médias Citations et témoignages de responsables de l’armée et du renseignement israélien à l’appui, il rappelle que l’accord de trêve prévoyait un allègement du blocus qui n’a jamais été appliqué, et que c’est Israël qui rompu la trêve le 4 novembre, au lieu de mettre à profit cette accalmie pour la consolider. D’autre part, note-t-il, la description du Hamas comme un mouvement terroriste ayant pour objectif la destruction d’Israël ne correspond pas à la réalité. Le Hamas est depuis plusieurs années entré dans le jeu politique, abandonnant le recours aux attentats terroristes, et il défend désormais la solution des deux états dans les frontières de 1967. Au delà de ces rappels factuels, Siegman juge que la politique de confrontation choisie par Israël, si elle peut amener des succès tactiques, aura sur le long terme l’effet inverse, en renforçant les tendances les plus radicales au détriment des perspectives de paix.

Par Henry Siegman, London Review of Books, 15 janvier 2009

Les gouvernements et la plupart des médias occidentaux ont accepté nombre d’assertions israéliennes justifiant l’assaut militaire sur Gaza : que le Hamas avait constamment violé puis ensuite refusé de prolonger la trêve de six mois qu’Israël avait respectée ; qu’Israël n’avait donc d’autre choix que de détruire la capacité du Hamas de lancer des missiles sur les villes israéliennes ; que le Hamas est une organisation terroriste, appartenant au réseau jihadiste mondial ; et qu’Israël a non seulement agi pour sa propre défense mais au nom de la lutte internationale que mènent les démocraties occidentales contre ce réseau.

Je n’ai connaissance d’aucun journal, station de radio ou de TV américains d’importance dont la couverture de l’assaut sur Gaza ait interrogé cette version des événements. Les critiques dirigées contre les actions d’Israël, si tant est qu’il y en ait eu (et il n’y en a eu aucune émanant de l’administration Bush), ont plutôt convergé sur le fait de savoir si le carnage des forces armées israéliennes est proportionnel à la menace qu’elles tentaient de contrer, et si elles prenaient des mesures suffisantes pour éviter les victimes civiles.

Les questions concernant la paix du Moyen-orient sont en général décrits en termes d’euphémismes trompeurs. Je voudrais au contraire déclarer ici sans ambages que chacune de ces assertions est un mensonge. C’est Israël, et non pas le Hamas, qui a violé la trêve : le Hamas avait accepté d’arrêter ses tirs de roquettes vers Israël ; en retour, Israël devait alléger sa pression sur Gaza. En fait, pendant la trêve, elle s’est accrue. Ceci a été confirmé non seulement par tous les observateurs et ONG internationaux neutres présents sur place mais aussi par le brigadier général de réserve Shmuel Zakai, un ancien commandant de la Division de Gaza des forces armées israéliennes. Dans un entretien accordé au Ha’aretz le 22 décembre, il a accusé le gouvernement d’Israël d’avoir fait une « erreur majeure » pendant la tahdiyeh, la période de six mois de trêve relative, en « empirant nettement la situation économique catastrophique des Palestiniens de la bande de Gaza, au lieu de profiter du calme pour l’améliorer. . . Quand on établit une tahdiyeh, et que la pression économique sur la Bande se poursuit, » déclarait le Général Zakai, « il est évident que le Hamas essaiera d’obtenir une tahdiyeh améliorée, et que leur façon de l’atteindre est la reprise des lancers de Qassam. . . On ne peut pas simplement donner des coups, maintenir les Palestiniens de Gaza dans leur détresse économique, et s’attendre à ce que le Hamas se contentera simplement de s’asseoir sans agir ».

La trêve, qui a commencé en juin l’an dernier et devait être renouvelée au mois de décembre, exigeait des deux parties qu’elles s’abstiennent de toute action violente l’une contre l’autre. Le Hamas devait cesser ses tirs de roquettes et empêcher les tirs des autres groupes comme le Djihad Islamique (même les agences de Renseignement d’Israël ont reconnu que ceci avait été exécuté avec une efficacité étonnante), et Israël devait mettre fin à ses assassinats ciblés et ses incursions militaires. Cette entente a été sérieusement violée le 4 novembre, quand les forces armées israéliennes sont entrées à Gaza et ont tué six membres du Hamas. Le Hamas a répondu en lançant des fusées Qassam et des missiles Grad. Même alors, il avait offert d’étendre la trêve, mais seulement à condition qu’Israël mette fin à son blocus. Israël a refusé. Il aurait pu remplir son devoir de protection de ses citoyens en consentant à alléger le blocus, mais il n’a même pas essayé. On ne peut affirmer qu’Israël ait lancé son attaque pour protéger ses citoyens des roquettes. Il l’a fait pour protéger son droit à poursuivre l’étranglement de la population de Gaza.

Tout le monde semble avoir oublié que le Hamas avait déclaré mettre fin aux attaques suicide et aux lancers de roquettes lorsqu’il a décidé de se joindre au processus politique palestinien, et avait pour l’essentiel respecté ses engagements pendant plus d’un an. Bush avait publiquement bien accueilli cette décision, la citant comme un exemple du succès de sa campagne pour la démocratie au Moyen-orient. (Il n’en avait aucun autre à revendiquer). Quand le Hamas a surpris en gagnant les élections, Israël et les Etats-Unis ont immédiatement cherché à délégitimer le résultat et ont pris le parti de Mahmoud Abbas, le leader du Fatah, qui avait été jusque - là mis écarté par les dirigeants d’Israël qui le traitaient de « volaille plumée ». Ils ont armé et entraîné ses forces de sécurité pour renverser le Hamas ; et quand le Hamas a anticipé - brutalement, sans conteste - cette tentative de renversement par la violence du résultat de la première élection démocratique honnête au Moyen-orient, Israël et l’administration Bush ont imposé le blocus.

Israël cherche à contredire ces faits indiscutables en maintenant qu’en retirant les colonies israéliennes de Gaza en 2005, Ariel Sharon a offert au Hamas la chance de prendre le chemin de l’indépendance, une chance qu’il aurait refusé de saisir ; au lieu de cela il aurait transformé Gaza en un base de lancement de missiles sur la population civile d’Israël. L’accusation est doublement mensongère. D’abord, quelque soient ses défauts, le Hamas avait restauré à Gaza, pour la première fois depuis plusieurs années, un niveau de loi et d’ordre inconnu, et y avait réussi sans les grandes sommes d’argent que les donateurs ont fait pleuvoir sur l’Autorité palestinienne menée par le Fatah. Il a éliminé les bandes et les chefs militaires violents qui terrorisaient Gaza sous le règne du Fatah. Les musulmans non pratiquants, les chrétiens et les autres minorités ont une liberté religieuse sous la direction du Hamas plus grande qu’ils ne l’auraient en Arabie Saoudite, par exemple, ou dans beaucoup d’autres régimes arabes.

Le plus grand mensonge est que le retrait de Sharon de Gaza ait été voulu comme un prélude a de plus amples retraits et à un accord de paix. Voici comment le conseiller principal de Sharon, Dov Weisglass, qui était aussi son négociateur principal avec les Américains, avait décrit le retrait de Gaza, dans un entretien avec le Ha’aretz en août 2004 :

L’accord auquel je suis en réalité parvenu avec les Américains était qu’une partie des colonies [c-a-d les principaux blocs de colonies en Cisjordanie] ne ferait pas du tout partie d’éventuelles négociations, et que le reste ne serait traité que lorsque les Palestiniens deviendraient des Finlandais. . . La signification [de l’accord avec les Etats-Unis] est le gel du processus politique. Et quand vous gelez ce processus, vous empêchez l’établissement d’un état palestinien et vous empêchez une discussion sur les réfugiés, les frontières et Jérusalem. En réalité, la totalité de ce qui est appelé l’état palestinien, avec tout qu’il signifie, a été enlevé de notre programme indéfiniment. Et tout ceci avec l’autorité et la permission [du Président Bush]. . . Et la ratification des deux Chambres du Congrès.

Les Israéliens et les Américains pensent-ils que les Palestiniens ne lisent pas les journaux israéliens, ou que quand ils ont vu ce qui arrivait en Cisjordanie ils ne pourraient pas déchiffrer ce que Sharon préparait ?

Le gouvernement d’Israël aimerait que le monde croie que le Hamas a lancé ses roquettes Qassam parce que c’est ce que font les terroristes et que le Hamas est un groupe intrinsèquement terroriste. En fait, le Hamas n’est pas plus une « organisation de terreur » (le terme préféré d’Israël) que le mouvement sioniste ne l’a été pendant sa lutte pour une patrie juive. A la fin des années 1930 et dans les années 1940, les partis du mouvement sioniste ont recouru aux activités terroristes pour des raisons stratégiques. Selon Benny Morris, c’est l’Irgoun qui a le premier visé des civils. Il écrit dans les Righteous Victims qu’une vague de terrorisme arabe en 1937 « a déclenché une vague d’attentats à la bombe contre les foules et les autobus arabes par l’Irgoun, introduisant une nouvelle dimension au conflit ». Il documente aussi des atrocités commises pendant la guerre de 1948-49 par les forces armées israéliennes, admettant dans un entretien de 2004, publié dans le Ha’aretz, que le matériel déclassifié par le Ministère de la Défense d’Israël a montré que « il y avait eu beaucoup plus d’actes de massacre israéliens que je ne l’avais pensé auparavant. . . Dans les mois d’Avril-Mai 1948, il a été donné aux unités du Haganah des ordres d’action qui déclaraient explicitement qu’ils devaient déraciner les villageois, les expulser, et détruire les villages ». Dans un certain nombre de villages et de villes palestiniennes les forces armées israéliennes ont procédé à des exécutions organisées de civils. Interrogé par le Ha’aretz pour savoir s’il condamnait le nettoyage ethnique, Morris a répondu que ce n’était pas le cas :

« Il ne pouvait pas y avoir un Etat juif sans le déracinement de 700.000 Palestiniens. Il était donc nécessaire de les déraciner. Il n’y avait d’autre choix que celui d’expulser la population. Il était nécessaire de nettoyer l’arrière-pays et de nettoyer les secteurs frontaliers et de nettoyer les routes principales. Il était nécessaire de nettoyer les villages à partir d’où on faisait feu sur nos convois et nos colonies. »

En d’autres termes, quand les juifs ciblent et tuent des civils innocents pour faire avancer leur lutte nationale, ils sont des patriotes. Quand leurs adversaires le font, ce sont des terroristes.

Il est trop simple de décrire le Hamas simplement comme une « organisation de terreur ». C’est un mouvement nationaliste religieux qui recourt au terrorisme, comme le mouvement sioniste l’a fait pendant sa lutte pour l’indépendance, dans la conviction erronée que c’est le seul moyen de mettre fin à une occupation oppressive et entraîner la formation d’un état palestinien. Alors que l’idéologie du Hamas appelle formellement à établir un état palestinien sur les ruines de l’état d’Israël, ceci ne détermine pas les véritables politiques du Hamas aujourd’hui, pas plus que la même déclaration dans la charte de l’OLP ne déterminait les actions du Fatah.

Ce ne sont pas là les conclusions d’un apologiste du Hamas mais les opinions de l’ancien chef du Mossad et conseiller de sécurité nationale de Sharon, Ephraim Halevy. La direction de Hamas a connu un changement « sous notre nez même », écrivait récemment Halevy dans le Yedioth Ahronoth, en reconnaissant que « son objectif idéologique n’est pas réalisable et ne le sera pas dans l’avenir prévisible ». Il est maintenant prêt et désireux de voir l’établissement d’un état palestinien dans les frontières temporaires de 1967. Halevy notait alors que le Hamas n’a pas précisé à quel point ces frontières seraient « temporaires », « ils savent qu’à partir du moment ou un état palestinien est établi avec leur coopération, ils seront obligés de changer les règles du jeu : ils devront adopter une voie qui pourrait les mener loin de leurs objectifs idéologiques originaux ». Dans un article précédent, Halevy avait aussi insisté sur l’absurdité qu’il y a à relier le Hamas à al-Qaida.

Aux yeux d’al-Qaida, les membres du Hamas sont perçus comme des hérétiques en raison de leur désir affirmé de participer, même indirectement, aux processus de n’importe quel entente ou accord avec Israël. La déclaration [du chef du bureau politique du Hamas, Khaled] Mashaal contredit diamétralement l’approche d’al-Qaida, et fournit a Israël une occasion, peut-être historique, de l’utiliser pour le mieux.

Alors pourquoi les dirigeants d’Israël sont si déterminés à détruire le Hamas ? Parce qu’ils croient que sa direction, contrairement à celle du Fatah, ne peut pas être intimidée pour accepter un accord de paix qui établisse un « Etat » palestinien composé d’entités territorialement déconnectées sur lesquelles Israël pourrait garder un contrôle permanent. Le contrôle de la Cisjordanie a été l’objectif permanent de l’armée, du renseignement et des élites politiques d’Israël depuis la fin de la Guerre des Six-Jour.[*] Ils croient que le Hamas ne permettrait pas un tel cantonisation du territoire palestinien, quelque soit la durée de l’occupation. Ils peuvent avoir tort concernant Abbas et sa cohorte usée, mais ils ont tout à fait raison concernant le Hamas.

Les observateurs moyen-orientaux se demandent si l’assaut d’Israël contre le Hamas arrivera à détruire l’organisation ou a l’expulser de Gaza. Ceci est une question non pertinente. Si Israël a l’intention de garder le contrôle sur la future entité palestinienne, il ne trouvera jamais un partenaire palestinien, et même s’il arrive à démanteler le Hamas, le mouvement sera avec le temps remplacépar une opposition palestinienne bien plus radicale.

Si Barack Obama choisit un émissaire au Moyen-orient qui s’accroche à l’idée que les outsiders ne devraient pas présenter leurs propres propositions pour un accord de paix juste et viable, encourageant ainsi les parties a renforcer leurs différences au lieu de les résoudre, il rend assuré la naissance d’une future résistance palestinienne, de loin plus extrême que celle du Hamas -probablement alliée avec al-Qaida. Pour les Etats-Unis, l’Europe et la plupart du reste du monde, ceci serait la pire issue possible. Peut-être que quelques Israéliens, dont les leaders des colons, croient-ils que cela servirait leurs buts, puisque cela fournirait au gouvernement un prétexte irrésistible pour tenir toute la Palestine. Mais ceci est une illusion qui provoquerait la fin d’Israël en tant qu’état juif et démocratique.

Anthony Cordesman, un des analystes militaires les plus fiables du Moyen-orient, et un ami d’Israël, affirme dans un rapport publié le 9 janvier par le Center for Strategic and International Studies que les avantages tactiques d’une continuation de l’opération à Gaza étaient contrebalancés par le coût stratégique - et n’étaient probablement pas plus grands que n’importe quel gain qu’Israël aurait pu obtenir tôt dans la guerre grâce a des frappes sélectives sur des installations-clées du Hamas. « Israël s’est-il d’une manière ou d’une autre empêtré dans une guerre d’escalade sans un objectif stratégique clair, ou a t-il au moins un objectif qu’il puisse atteindre de façon crédible » ? s’interroge-t-il. « Israël finira-t-il par renforcer, politiquement, un ennemi qu’il aura battu en termes tactiques ? Les actions d’Israël compromettront-elles sérieusement la position des Etats-Unis dans la région, l’espoir de paix, de même que les régimes et les voix arabes modérés dans le processus ? Pour répondre sans ambages, la réponse jusqu’ici semble être oui ». Cordesman conclut que « n’importe quel dirigeant peut adopter une position intransigeante et proclamer que les gains tactiques représentent une victoire significative. Si c’est tout ce que Olmert, Livni et Barak ont pour réponse, alors ils se sont déshonorés et ont porté un coup à leur pays et leurs amis ».

Henri Siegman dirige le US Middle East Project, sis à New York. Il est professeur associé à la School of Oriental and African Studies de l’université de Londres. Par le passé, il a occupé le poste de directeur de l’American Jewish Congress et du Synagogue Council of America.

Publication originale London Review of Books, traduction Karim Loubnani pour Contre Info
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Message par oliv »

Ok, la situation du peuple palestinien a gaza est intolerable, ainsi que les agissements de l'armee israelienne dans ce territoire...mais arretons de faire passer le Hamas pour des anges. Il s'agit qd meme d'une organisation religieuse integriste bafouant le droit des femmes et s'inspirant uniquement du Coran de maniere la plus extremiste...
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drÖne
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Message par drÖne »

J'ai pas trop l'impression que ce texte cherche à faire passer le Hamas pour des anges. Il émane d'un juif israélien, qui a dépassé, comme beaucoup de pacifistes israélien, l'idée qu'il y aurait d'un côté des salauds absolus inspirés par satan et de l'autre le peuple élu éternellement victime des salauds de l'autre bord. Il présente, me semble-t-il, une analyse un peu historicisée des conditions qui ont "fait" le Hamas : la destruction du Fatah, en partie organisée par Israel avec l'argument selon lequel le Fatah c'était des salauds de terroristes, et aujourd'hui, c'est au Hamas, parti démocratiquement élu, faut-il le rappeler, que cette rhétorique s'applique. Ensuite, quoi ? On doit butter tous les salauds parce que nous, les vrais démocrates, on est du côté du droit ? Même si les salauds ont été élus démocratiquement ? C'est laisser la porte ouverte à des radicalismes bien plus violents encore que celui du Hamas : c'est aussi ça que dénonce cet article. Le fait que si on reproduit avec le Hamas ce qu'on a fait avec le Fatah, on aura pire. Et que si il y a des salauds d'un côté, il y en a aussi pas mal de l'autre : c'est Israel, en ce moment, qui tue des femmes et des enfants, pas le Hamas. Et le sionnisme aussi a été un mouvement terroriste, et je ne suis pas sur que la place de la femme dans cette religion soit toujours - comme avec les fondamentalismes chrétiens ou protestants d'ailleurs - réjouissante. Enfin, bref, relis bien le texte et tu verras qu'il ne décerne pas la palme de la démocratie au Hamas.
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Qu’est-ce que le Hamas ?

Message par drÖne »

A propos du Hamas, j'ai trouvé cet article intéressant. Mais je ne suis pas du tout spécialiste du moyen orient et du conflit israélo palestinien. Ca émane du Diplo, ça peut donc être lu sans trop de pincettes, me semble-t-il :

http://blog.mondediplo.net/2009-01-27-Nouvel-article
Qu’est-ce que le Hamas ?


mardi 27 janvier 2009, par Alain Gresh


Le Hamas suscite, sur ce blog et ailleurs, bien des frayeurs et des fantasmes, fondés souvent sur une méconnaissance du mouvement, de son histoire et des ses évolutions. Avant d’en venir à cette réflexion sur le Hamas, signalons que Le Monde diplomatique de février, en vente dans les kiosques, consacre un dossier de six pages aux événements de Gaza et à leurs conséquences sur la région.

Notons aussi, certains contributeurs de ce blog l’on déjà fait, la tribune écrite par le prince saoudien Turki Al-Fayçal dans le quotidien britannique Financial Times et dont l’écho est important (« Saudi patience is running out », 22 janvier). Accusant le président Bush d’avoir laissé la région dans un état de désordre, il met en garde sur le fait que les initiatives de paix risquent de ne plus être à l’ordre du jour et que l’Arabie saoudite tournera alors le dos à l’Occident. Il révèle que le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a écrit au souverain saoudien Abdallah une lettre reconnaissant le rôle dirigeant de l’Arabie dans le monde musulman et l’appelant à prendre une position plus ferme face aux massacres de Gaza.

Le prince précise que le royaume, « jusqu’à présent, a rejeté ces appels, mais que chaque jour qui passe rend cette réserve plus difficile à expliquer, quand Israël tue délibérément des Palestiniens, s’approprie leurs terres, détruit leurs maisons, déracine leurs fermes et impose un blocus inhumain. (...) Au final, le royaume ne sera plus capable d’empêcher ses citoyens de participer à la protestation mondiale contre Israël. »

Revenons maintenant au Hamas et rappelons quelques éléments de son histoire. Le Mouvement de la résistance islamique (dont l’acronyme en arabe donne « Hamas », qui signifie « zèle ») a été créé par la Société des Frères musulmans en décembre 1987, au lendemain du déclenchement de la première Intifada. Le Hamas se développe d’abord à Gaza, qui restera le principal de ses fiefs, avant d’étendre ses activités à la Cisjordanie.

Pourquoi les Frères musulmans ont-ils pris cette décision de créer une organisation de combat ? Après la défaite arabe de juin 1967, il a fallu plusieurs années aux Frères musulmans pour se réorganiser. Ils vont profiter de la vague islamiste qui monte dans toute la région. Dans les territoires occupés, la Société bâtit un réseau dense d’institutions sociales autour des mosquées : jardins d’enfants, bibliothèques, cliniques, clubs sportifs, etc. Entre 1967 et 1987, le nombre de mosquées passe de 400 à 750 en Cisjordanie, de 200 à 600 à Gaza. Créé en 1973, le Centre islamique de Gaza, dirigé par le cheikh Ahmed Yassine, devient le cœur battant de la Société. L’organisation reçoit un appui important de l’étranger, notamment de l’Arabie saoudite, qui lui donne des moyens considérables.

Néanmoins, malgré leurs moyens et leurs atouts, les Frères musulmans souffrent, dans les années 1970 et 1980, de leur quiétisme face à l’occupation. Si leur but final reste la libération de la Palestine, ils accordent la priorité à la réforme de la société — d’où leur relative inertie dans le combat nationaliste. Les services de renseignement israéliens le comprennent si bien qu’ils font preuve d’une réelle mansuétude à l’égard des Frères, considérés comme un utile contrepoids à l’OLP. En 1980, une scission frappe le mouvement : le djihad islamique reproche aux Frères musulmans leur trop grande passivité et se lance rapidement dans l’action violente.

La décision de créer le mouvement Hamas et de participer à l’Intifada témoigne d’une réelle évolution de la Société des Frères musulmans, au sein de laquelle des militants plus jeunes ont pris des responsabilités. Le Hamas se montrera très actif durant la « révolte des pierres », n’hésitant pas à rester à l’écart de la direction unifiée qui se réclame de l’OLP. Très bien structuré, proche des plus démunis, disposant d’une aura religieuse, le mouvement s’affirme comme un concurrent sérieux au Fatah et à l’OLP. Il crée une branche militaire, les brigades Ezzedine Al Kassam. Un épisode jouera un rôle important dans l’histoire du mouvement : en décembre 1991, le premier ministre israélien Itzhak Rabin expulse 415 militants vers le Liban. Ils finiront par rentrer, mais cette répression ne fait qu’accroître la popularité de l’organisation – et crée ses premiers contacts avec le Hezbollah.

Le Hamas adopte sa Charte, le 18 août 1988. Il reconnaît sa filiation avec l’organisation des Frères musulmans. Il « considère que la terre de Palestine est une terre islamique waqf [1] pour toutes les générations de musulmans jusqu’au jour de la résurrection ». Enfin, malgré les rivalités — et parfois les affrontements —, le Hamas déclare à propos de l’OLP : « Notre patrie est une, notre malheur est un, notre destin est un et notre ennemi est commun. » C’est pour l’essentiel sur le terrain politique, et non religieux, que le Hamas s’oppose à l’OLP : il reprend les thèses qui étaient dominantes dans l’OLP avant les années 1975, celles de la libération de toute la Palestine. Enfin, le texte de la Charte a des connotations antisémites, avec une référence au Protocole des sages de Sion (un faux créé par la police tsariste au début du XXe siècle) et aussi une dénonciation des « complots » des loges maçonniques, des clubs Rotary et Lyons…

Ces notations antisémites sont condamnables et condamnées largement. Il faut dire que ces délires, notamment sur Le Protocole des sages de Sion se retrouvent fréquemment dans certains livres et articles publiés dans le monde arabe. Interrogés là-dessus, les dirigeants du Hamas affirment qu’il ne faut tenir compte que de leur plate-forme défendue durant la campagne de 2006 (lire plus bas) – argument qui n’est pas recevable en ce qui concerne les références au protocole de Sion.

Une caractéristique du Hamas est soulignée par Jean-François Legrain :

« Un second contresens consiste à faire de Hamas un mouvement nationaliste au discours religieux quand il s’agit fondamentalement d’un mouvement de resocialisation religieuse, certes doté d’un agenda politique. (...) Hamas, même s’il avait quasi instantanément phagocyté l’Association des Frères musulmans dont il n’était à l’origine que le “bras”, avait pour raison d’être essentielle dans l’esprit de cheikh Yassine que sa mission de da’wa (prédication active de l’islam) à laquelle étaient strictement subordonnés le politique et le militaire. A plusieurs reprises, son appréhension des rapports de force avec Israël et l’Autorité palestinienne a ainsi conduit Hamas, aux antipodes de l’attitude de tout mouvement de libération nationale, à prendre ses distances tant avec le militaire (les différentes trêves de 1995, 1996 et des dernières années) qu’avec le politique (par exemple et de façon surprenante, au lendemain même de la tournée triomphale du cheikh Yassine dans le monde musulman à sa sortie de prison en 1998). Hamas s’est alors replié sur le tissu associatif assujetti à ses exigences de mobilisation morale, seules quelques cellules manifestant leur désapprobation par des initiatives militaires locales. »

Dans la logique de son programme politique, le Hamas condamne les accords d’Oslo signés le 13 septembre 1993. Mais l’installation de l’Autorité palestinienne à Gaza en 1994 pose de nouveaux défis à l’organisation, prise entre sa rhétorique de libération totale de la Palestine, sa volonté de ne pas provoquer une guerre civile inter-palestinienne et sa détermination à préserver son réseau associatif. Le Hamas engage un dialogue avec Yasser Arafat. Ce dernier joue à merveille de la carotte et du bâton, multipliant les arrestations et les intimidations tout en dialoguant avec l’organisation et en autorisant certains de ses organes de presse. Fin 1995, il paraît même sur le point d’obtenir la participation du mouvement aux élections du parlement palestinien de janvier 1996, mais cela n’aboutira pas.

L’assassinat d’Itzhak Rabin en novembre 1995, l’escalade entre les forces israéliennes et le Hamas – marquée par une vague d’attentats-suicides début 1996 –, l’extension permanente de la colonisation, la victoire de Benjamin Netanyahou aux élections législatives israéliennes vont changer la donne. Malgré la victoire d’Ehoud Barak aux élections de 1999, les négociations de paix échoueront (largement par la faute du gouvernement israélien — lire « Le “véritable visage” de M. Ehoud Barak, Le Monde diplomatique, juillet 2002) et éclate la seconde Intifada en septembre 2000.

La mort d’Arafat, l’élection de Mahmoud Abbas à la tête de l’Autorité, la convocation de nouvelles élections législatives palestiniennes en janvier 2006, marquent une nouvelle étape dans les territoires occupés. Le scrutin va confirmer l’évolution du mouvement Hamas vers un plus grand pragmatisme. Alors qu’il avait refusé les accords d’Oslo et toutes les institutions qui lui étaient liées, le Hamas accepte de participer aux élections de janvier 2006. Plusieurs de ses dirigeants, dont le cheikh Ahmed Yassine, assassiné par l’armée israélienne en 2004, ont affirmé qu’ils acceptaient la création d’un Etat palestinien sur les territoires occupés de 1967. Le programme politique défendu durant la campagne électorale n’a rien à voir avec le contenu de la Charte de 1988 (lire Paul Delmotte, « Le Hamas et la reconnaissance d’Israël », Le Monde diplomatique, janvier 2007).

Il est important de rappeler les deux raisons qui ont amené les Palestiniens à voter pour le Hamas : la corruption de l’Autorité palestinienne (et donc du Fatah) et, surtout, le fait que la voie choisie par le Fatah à Oslo, celle de la négociation et de l’abandon de la lutte armée, avait échoué. Le Hamas n’est pas contre des négociations, mais pense que celles-ci doivent s’accompagner d’une pression militaire (c’était d’ailleurs la position défendue par une partie des dirigeants du Fatah au début de la seconde Intifada, notamment par Marwan Barghouti).

Le Hamas a multiplié les déclarations en ce sens depuis plusieurs mois. L’ancien président américain Jimmy Carter a rencontré les dirigeants du Hamas à Gaza ainsi que Khaled Mechaal, le chef du bureau politique du Hamas à Damas. Carter écrit : Après de longues discussions avec les dirigeants de Gaza, ces dirigeants du Hamas (à Damas) ont affirmé qu’ils « accepteraient tout accord de paix qui serait négocié entre les Israéliens et le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, qui dirige aussi l’OLP, à la condition que cet accord soit accepté par les Palestiniens par référendum ou par un gouvernement élu d’unité nationale ». « An Unnecessary War » (Washington Post, 8 janvier). Lors d’un entretien que j’ai réalisé à Damas en décembre, Khaled Mechaal a déclaré : « Le Hamas et les forces palestiniennes ont offert une occasion en or d’apporter une solution raisonnable au conflit israélo-arabe. Malheureusement, personne ne s’en est saisi, ni l’administration américaine, ni l’Europe, ni le Quartet. Notre bonne volonté s’est heurtée au refus israélien que personne n’a la capacité ou la volonté de surmonter. Dans le document d’entente nationale de 2006 signé avec toutes les forces palestiniennes (à l’exception du djihad islamique), nous affirmons notre acceptation d’un Etat palestinien dans les frontières du 4 juin 1967, avec Jérusalem comme capitale, sans colonies et avec le sujet (mawdou’) du droit au retour. C’est le programme commun aux forces palestiniennes. Certaines veulent plus, d’autres moins. Ce programme date de trois ans. Les Arabes veulent quelque chose de similaire. Le problème est en Israël. Les Etats-Unis jouent un rôle de spectateur dans les négociations et ils appuient les réticences israéliennes. Le problème n’est donc pas le Hamas, ni les pays arabes : il est israélien. »

Pourquoi le Hamas prône-t-il la violence ? Son principal argument est que le chemin de la seule négociation adopté par l’OLP en 1993 n’a donné aucun résultat. On peut aussi remarquer que l’Autorité sous la direction de Mahmoud Abbas, qui négocie depuis 2005 un accord de paix n’a pas réussi à obtenir que le gouvernement israélien accepte la création d’un Etat palestinien sur tous les territoires occupés en 1967, avec Jérusalem-est comme capitale.

Enfin, une dernière remarque concernant la violence contre les civils. Toute mort de civil est une mort de trop. Mais si l’on condamne les tirs de roquettes du Hamas, ne faut-il pas d’abord condamner les crimes commis par un Etat organisé, membre des Nations unies ? Le terrorisme d’Etat n’est-il pas plus condamnable que tout terrorisme ? Je rappelle, encore une fois, ce qu’écrivait Nelson Mandela, évoquant ses négociations avec le gouvernement blanc sud-africain et ses demandes d’arrêter la violence, Nelson Mandela a écrit : « Je répondais que l’Etat était responsable de la violence et que c’est toujours l’oppresseur, non l’opprimé, qui détermine la forme de la lutte. Si l’oppresseur utilise la violence, l’opprimé n’aura pas d’autre choix que de répondre par la violence. Dans notre cas, ce n’était qu’une forme de légitime défense. »

Peut-on faire confiance au Hamas, alors que sa Charte n’a pas été abrogée ? Rappelons que la même question a été posée durant des années à l’OLP et à Yasser Arafat et que les accords d’Oslo ont été signés avant que cette charte n’ait été officiellement abrogée par le Conseil national palestinien. Pendant deux décennies, Israël et les Etats-Unis ont refusé tout contact avec l’organisation sous ce prétexte et sous le prétexte qu’elle était une organisation terroriste ; la France et nombre de pays européens avaient, à l’époque, refusé cet ostracisme.

L’Union européenne et les Etats-Unis posent trois conditions au dialogue avec le Hamas : qu’il reconnaisse l’Etat d’Israël ; qu’il renonce à la violence ; qu’il reconnaisse les accords d’Oslo. Deux points méritent d’être soulignés : pourquoi le dialogue avec le gouvernement israélien n’est-il pas soumis aux mêmes conditions ? Pourquoi Israël ne reconnaît-il pas un Etat palestinien dans les frontières de 1967 ? Pourquoi ne renonce-t-il pas à la violence ? Pourquoi construit-il des colonies dans les territoires occupés en violation des accords d’Oslo (et du droit international) ?

D’autre part, si l’on pense qu’il faut faire évoluer le Hamas, comment le faire sans dialoguer avec lui ? N’est-ce pas le dialogue européen avec l’OLP qui a permis d’avancer ?
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Je voudrais renvoyer aux remarquables reportages faits dans Le Monde diplomatique depuis plus d’une quinzaine d’années sur cette organisation par Wendy Kristianasen, que l’on peut retrouver sur le cédérom du Monde diplomatique ; ainsi qu’aux analyses de Jean-François Legrain, notamment le texte distribué lors de son audition à la commission des affaires étrangères du Sénat, le 14 janvier, « Gaza : des guerres dans quelles perspectives ? ». On peut également lire un intéressant entretien avec Ali Jarbawi (PDF) sur le site de la revue Confluences Méditerranée.

Enfin, le livre de Khaled Hroub, Le Hamas (Démopolis) est le seul ouvrage sérieux en français sur l’organisation.
Notes

[1] Bien de main-morte, c’est-à-dire inaliénable.
drÖne
d'où, chose remarquable, rien ne s'ensuit...
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