L'APPEL

Désobéissances et micro-résistances.

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drÖne
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Message par drÖne »

Oui, j'avais vu ce site. Il y a quelques débats dans des revues en ligne d'extrême gauche, versant "théorique". J'ai du mal à cerner ces mouvements, en fait. L'utilisation de la référence au communisme me gène depuis le début dans l'appel. Et je ne sais pas trop quoi penser de leur conception d'une révolution par la violence : est-ce un "truc" rhétorique pour donner une allure épique à l'appel, dont l'intérêt serait aileurs, ou est-ce qu'ils y croient ?

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drÖne
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staivair
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Message par staivair »

dana a écrit :
Donc, je me méfie un peu des décroissants, des épicuriens et de certains ermites.
C'est plus facile d'être épicurien quand on a déjà beaucoup que quand on part de rien. PLus facile de se priver de quelque chose que l'on a de ce que l'on n'aura pas de toutes façons.
Par exemple, j'en connais certains dont la décroissance consiste à se priver d'un week end à new york, ou d'une semaine au ski.
bien vu ...
en ce moment (depuis 2 ans) je m'interesse beaucoup au "mouvement de la décroissance" ou à la "simplicité volontaire", ça vient en effet pour beaucoup de gens comme moi entre autres qui ont déjà trop et qui en veulent moins, pour des prétextes écologiques (destruction de la planète par péché de surconsommation ...) ou politique (??) (anti-dictature de la croissance) (politique : est-ce le bon mot??).
Les RMistes : des décroissants par obligation ... (comme j'ai lu sur un forum)
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patman
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Message par patman »

"Quoique profondément différent, Appel illustre aussi une situation de crise en s’efforçant à sa façon de la dépasser.

Réagir devant Appel en sortant notre balance théorique pour y peser le pour et le contre n’aurait aucun sens, ou témoignerait d’une triste indifférence à la subversion sociale qui naît, agit, se cherche et se formalise. Quelles que soient les réserves qu’il peut susciter, ce livre manifeste une existence, une expérience, en particulier dans les actions anti-mondialisation des dernières années, et fait à sa manière le point sur l’époque. Exprimé dans une langue que l’on a envie de lire, l’acquis théorique en inclut des éléments de compréhension essentiels empruntés notamment à Marx, à la gauche communiste, à l’ IS, à l’anarchie, sans revendiquer aucune filiation, sans directement citer aucun classique : intégrées au texte, les citations sont souvent attribuées à " un ami " ou " un vieil ami ".

" C’est à force de voir l’ennemi comme un sujet qui nous fait face – au lieu de l’éprouver comme un rapport qui nous tient – que l’on s’enferme dans la lutte contre l’enfermement. " ( p.8)

" La pratique du communisme, telle que nous la vivons, nous l’appelons le Parti. Lorsque nous atteignons un niveau supérieur de partage, nous nous disons que nous construisons le Parti. Certainement d’autres, que nous ne connaissons pas encore, construisent aussi le Parti, ailleurs. Cet appel leur est adressé. " (p.63)

" (..) la construction du Parti, dans son aspect le plus visible, consiste pour nous dans la mise en commun, la communisation de ce dont nous disposons. Communiser un bien veut dire : en libérer l’usage et, sur la base de cette libération, expérimenter des rapports affinés, intensifiés, complexifiés. " (p.66)

" Il est des circonstances, comme dans une émeute, où le fait de pouvoir se soigner entre camarades augmente considérablement notre capacité de ravage. Qui peut dire que s’armer ne participe pas de la constitution matérielle d’une collectivité ? " (p.67)


Communisation est ici définie comme antagonique à ce monde, en conflit irréconciliable et violent (jusqu’à l’illégalité) avec lui. Elle diffère donc de l’alternative qui cherche (et souvent réussit) à se faire accepter à la marge, et à coexister durablement avec l’Etat et le salariat, dans l’espoir que le rapport de forces s’inverse un jour tout seul, et que les zones et activités " libérées " deviennent majoritaires puis finissent par tout emporter, sans révolution, grâce à la supériorité naturelle de rapports humains et fraternels sur les relations mercantiles et de domination. Non seulement Appel ne partage pas cette vision, mais il la combat.

Cependant, comment " rendre habitable la situation d’exception " (p.78), par exemple comment vivre en dehors du travail, sans un mouvement de grande ampleur en rupture avec l’ordre établi ?

Appel suppose ceux à qui il s’adresse déjà organisés (ou en voie de l’être) et déjà relativement nombreux. Il est permis de douter qu’il en soit ainsi. Le livre reconnaît que l’expérience des Black Blocs a montré les limites de la résistance sociale : si se défendre est difficile, comment passer à l’offensive ?

A ne pas se le demander, on risque de théoriser une communisation limitée à un pas de côté, sans aucun doute nécessaire à une révolution, mais non suffisant. Communiser, c’est expérimenter d’autres rapports, d’autres façons de vivre, sur tous les plans. Mais c’est aussi obligatoirement plus et autre chose qu’étendre au maximum les marges d’autonomie que concède cette société. Nous faisons nôtre la définition du communisme comme partage, comme être et faire ensemble, comme processus, et comme conflit. Mais comment pratiquer maintenant, dans la réalité sociale qui prévaut en 2004, des liens, des lieux, des sécessions, qui ne soient pas une alternative plus radicale que d’autres, sans aucun doute plus violente et plus réprimée parce que souvent hors-la-loi, mais également intégrée au fonctionnement du capitalisme moderne ?

Désormais chaque ville d’Europe et d’Amérique du Nord (et bientôt de plus en plus en Asie) a son groupe écolo radical, sa communauté anar, son squat. Vivre en dehors du salariat est possible (sinon obligatoire) pour des millions d’Européens. L’hédonisme contemporain renverse la formule de V.Serge citée au début de cet essai : il nous invite à ne pas sacrifier le présent à l’avenir, à construire intensément des situations, à vivre maintenant autrement les mêmes rapports sociaux. Cet hédonisme converge avec l’alter-mondialisme dans un même refus de la globalité, et de toute destruction du pouvoir politique central: il serait possible de prendre le pouvoir sur soi et localement, et de remplacer une révolution sociale future par des millions de révolutions personnelles et micro-collectives.

L’Appel décrit un anti-mondialisme initialement subversif, puis réabsorbé par diverses bureaucraties, sans s’interroger assez sur la réalité d’un tel mouvement, sur sa naissance une quinzaine d’années après la retombée des secousses révolutionnaires des années 60-70, dont la compréhension est indispensable pour comprendre où nous en sommes.

Si, comme l’affirme le livre, les anti-mondialisateurs radicaux avaient vaincu la gauche mondiale dans la rue, la forçant à se replier sur ses forums sociaux, nous (les auteurs d’Appel, nous-mêmes, et une foule d’autres) aurions une existence, une action régulière dans la rue, ce qui est rarement le cas, admettons-le. Il manque à cet Appel une analyse du mouvement social présent, des luttes, des reculs et des résistances dans le monde du travail, des grèves, de leur surgissement, de leur défaite souvent, de leur absence parfois, en un mot de tout ce que recouvre l’alter-mondialisme et dont il exprime les limites.

Malgré la " désertification " des rapports humains, le vieux monde n’est pas à l’agonie, et tient aussi par la crise où tout s’épuise pour durer, bourgeois et prolétaires.

Un " Appel " ne se réfute pas. On l’entend, ou l’on n’en tient aucun compte. Le lecteur aura compris notre choix. Appel reflète les dilemmes de l’époque, et ses aspirations. Si ambiguïté il y a, elle ne sera résolue que par la pratique de ceux qui ont lancé un tel appel, mais surtout par tous ceux qu’il concerne. Par exemple, un signe d’évolution positive vers un début de mûrissement social serait un lien entre les participants à Meeting et les initiateurs de l’Appel, une capacité à comprendre ce qu’il y a de commun et de différent entre ces deux voies, quitte à conclure peut-être qu’elles sont incompatibles. Si la situation est telle que la décrivent ceux qui préparent Meeting et ceux qui ont publié Appel, la simple concomitance des projets devrait susciter au minimum un intérêt réciproque chez leurs animateurs respectifs. A notre connaissance, tel n’est pas le cas."

Voir le site de Trop loin à http://troploin0.free.fr

J'ai bientôt fini pour mes petits lépreux de Jakarta. C'est tout la Croix Rouge ! Ils me demandent de faire des gants à trois doigts. Vous croyez que j'aurai pas plus vite fait de faire des moufles

++
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Message par dana »

Les RMistes : des décroissants par obligation ...
oui oui c'est ça
le pire pour moi qui suit rmiste depuis seulement 1 an et demie (après tout de même quelques bonnes années de chomage disséminées ici et là)
c'est tout se temps passé à compter
à compter ses sous
un de mes problèmes c'est que je déteste l'argent (et le commerce en général... les amateurs de psychanalyse souriront à ce sujet)
alors
je trouve ça gonflant de compter tout le temps
d'un autre côté je me souviens aussi d'un médecin de famille qui lui aussi comptait tout le temps
il se plaignait de ses impôts, qu'il lui fallait bosser 80 heures par semaine (ouarff) pour payer son train de vie (et quel train de vie ! villa superbe à la campagne, vacances aux seycheles etc..)

échos à patman :

Dans la société communiste réalisée notez bien qu'il n'y a plus de sous. Plus besoin, les gens sont suffisamment fut fut pu comprendre que ça leur sert à rien.
rien que pour ça je me sentirais assez communiste (ce qui me lourde ce sont les étapes assez pénibles sensées favoriser la survenue de cet état final.. :)

la communisation, oui bof, sur le papier , mouais, mais si il faut se taper des guss lecteurs de trotsky toute la journée..
les squats : beurk (trop de mecs lourds là dedans)
les anars, mouais, je sais pas, j'ai rien contre la loi a priori (et je doute qu'on ait jamais vu deux personnes s'entendre et se parler en l'absence d'une loi, fut-elle non-écrite)

humm
faudrait inventer un autre truc à mon avis
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drÖne
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Message par drÖne »

dana a écrit :
la communisation, oui bof, sur le papier , mouais, mais si il faut se taper des guss lecteurs de trotsky toute la journée..
les squats : beurk (trop de mecs lourds là dedans)
les anars, mouais, je sais pas, j'ai rien contre la loi a priori (et je doute qu'on ait jamais vu deux personnes s'entendre et se parler en l'absence d'une loi, fut-elle non-écrite)

humm
faudrait inventer un autre truc à mon avis
Pareil ! Surtout les sqatteurs anars : ceux là sont parfois les pires. J'en ai croisé des dogmatiques, intolérants, et pire, sans la moindre trace d'humour.

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drÖne
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Message par dana »

ha ben oui l'humour
(ce qui manque un poil au rédacteur de l'appel d'ailleurs)
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Message par TouF »

dana a écrit :ha ben oui l'humour
(ce qui manque un poil au rédacteur de l'appel d'ailleurs)
Ainsi qu'à une majorité de gens qui s'impliquent trop dans ce qu'ils croient!...(tare reconnue chez les militants/activiste de tout poil)
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Message par staivair »

drÖne a écrit : Il y a pire : j'ai lu quelque part qu'en amérique latine, certain pays (Honduras je crois) ayant privatisé l'eau, il est maintenant interdit aux paysans de recueillir l'eau de pluie...
lu sur : http://www.waternunc.com/fr2005/amd-ent ... a_2005.php
La privatisation de l'eau selon Vandana Shiva :
Avez-vous des exemples de formes concrètes que peut prendre la privatisation de l'eau sur le terrain ?
Ici dans les montagnes, au nord de Delhi, les projets de la Banque mondiale pour recueillir l'eau ont précisément été conçus pour privatiser l'eau. Nous nous sommes rendus dans des villages où les réservoirs d'eau publics ont été détruits et où les habitants ont été contraints d'utilser une connexion privée fonctionnant à l'aide d'un système de verrous pour ne pas qu'ils partagent avec le voisin. Dans tous les coins de la planète, la privatisation menace avec ses conséquences dramatiques sur les plus pauvres. A Cochabamba en Bolivie par exemple, Bechtel a tenté d'intégrer le marché et lorsque les femmes en milieu rural ont puisé l'eau de leur propre puits, elles se sont fait dire par le géant états-uniens "Vous volez notre eau ; nous détenons une concession". Dans les régions où les gens n'avaient pas les moyens d'acheter l'eau et recueillaient l'eau de pluie sur leurs toits, la multinationale leur a fait savoir que c'était interdit. D'où le slogan du mouvement bolivien anti-Bechtel "They even own the rain!" ["Ils possèdent même la pluie"] . En Afrique, dans plusieurs villages, des compteurs pré-payés fonctionnant à l'aide d'une carte à crédits ont été installés dans les habitats; si vous n'avez pas payé vos crédits, pas d'eau. Vous avez beau tomber malade, attraper le choléra ou voir vos enfants mourir; si vous n'avez pas payé, tant pis pour vous.
rien n'est vrai, rien n'est possible
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