L'APPEL

Désobéissances et micro-résistances.

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morue
echo of ze room
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Message par morue »

il y a aussi quelquechose qui me derange dans son texte, c'est le coté "j'ai tout vécu et je peux vous dire que toutes ces alternatives sont vaines" je trouve ca comique de la part d'un mec qui a pour seule proposition : tout casser.

par contre butter un keuf à coup de cocktails molotov voila qui va faire changer les choses, on en a eu la preuve recemment
je sent deja les solutions a tous nos problemes arriver ...
:D
dana
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Message par dana »

ben le résultat des keufs assaisonnés au coktail molotov, c'est sarko à 66% dans les sondages
fini de rigoler
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drÖne
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Message par drÖne »

morue a écrit :il y a aussi quelquechose qui me derange dans son texte, c'est le coté "j'ai tout vécu et je peux vous dire que toutes ces alternatives sont vaines" je trouve ca comique de la part d'un mec qui a pour seule proposition : tout casser.
Mais là tu carricatures ce texte et le résume à ce qu'il ne dit pas : l'appel ne fais pas tant que ça référence à la violence, et ne se résume pas à "tout casser". De plus, rien ne dit qu'il s'agit d'un mec : c'est un texte anonyme qui émane peut-être d'un collectif.

En ce qui me concerne, je n'ai sans doute pas tout vécu, mais j'approuve assez fortement la vision de l'appel au sujet de la vanité de l'activisme : quand je lis la partie "activisme" de Tekalombre (mais il y a d'autres sites d'activistes qu'on pourrait citer), outre que je suis plié de rire, j'y trouve le même désert de réflexion et d'action routinisées et moralisatrices, ringardes, sans souffle, que celles que gèrent les syndicalistes ou les politiques, et ça sonne comme une parfaite exemplification de ce que dénonce l'appel. Sortir des cadres, que ce soit par la violence ou l'érémitisme, reste la seule alternative à la molesse relativiste induite par le libéralisme. Et n'oublions pas que sans la violence, nous n'aurions jamais eu de démocratie... après tout, sous l'ancien régime, certains pensaient légitimement que la royauté étant le meilleur régime, la violence n'était pas légitime pour modifier les rapports de force. Aujourd'hui, tu transformes "royauté" par "démocratie", et ça fonctionne pareil, surtout à une époque où les représentants ne représentent plus qu'eux-mêmes, s'assoient sur le droit (cf. Chirac, futur justiciable qui s'accroche à son poste pour éviter la taule, même chose dans d'autres pays), et s'assoient encore plus sur le vote des citoyens (cf. l'élection de Chirac, ou le vote sur l'Europe).

Ceci dit, je ne suis pas de nature violente, et je désteste même ça, mais je pense sincèrement que certains conflits historiques ne trouvent une solution que dans la violence. Du coup, j'assume le fait que la seule chose qui me sépare de l'action violente, c'est mon dégout (et sans doute ma lâcheté, ou mon inexpérience du combat de rue), et non mes raisonnements ni ma "morale". En fait, plus ça va, et moins j'ai de "morale" et moins je crois à cette fiction d'une démocratie qu'on devrait soutenir pour éviter le chaos : le chaos, c'est les politiques qui l'organisent, et quand une usine licencie et fout des familles entières dans la merde, c'est aussi violent, physiquement violent, mais notre ventre mou de culture de la démocratie nous apprend à considérer ça comme non violent. Quand Srakozy insulte les banlieusards et s'exprime publiquement comme il le fait, il sait qu'il n'est plus dans le discours mais dans l'insulte, à savoir dans un espace ouvert entre le discours et la violence physique, car dire c'est faire. C'est d'ailleurs comme ça que c'est interprété, et s'il monte dans les sondage, c'est aussi parce que pas mal de gens approuvent la violence démocratique (envoi des CRS et de l'armée, au lieu de troiver des espaces de dialogue et d'ouvrir un champ d'intercompréhension et de savoir sur les phénomènes de la banlieue). Quand cet enculé de Fabius hurle à la tribune du PS qu'il faut envoyer chaque jeune garçon et chaque jeune fille à l'armée pour lui apprendre la démocratie et les valeurs de la république laïque, c'est ultra violent comme démarche.

La violenc, ce n'est pas que le fait de frapper : c'est aussi mettre en place les conditions discursives du passage à l'acte, et si l'appel le fait, alors constatons également que la plupart des politiques sont aussi violent voire plus que cet appel.

+A+
drÖne
d'où, chose remarquable, rien ne s'ensuit...
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LLB
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Message par LLB »

Zut, il est tard et je ne peux pas développer ce soir tout ce que m'inspire ce super échange, sur le don et le texte.
Au fait morue, je crois que tu as eu à éprouver de la violence, je me souviens de ton histoire.
En attendant de répondre plus longuement sur le don, je mets ici une partie d'un texte que j'avais rédigé pour commenter une petite biographie de Mauss qui est vraiment bien. Ce texte qui devait être une note de lecture n'a jamais paru, du coup je la publie ici même.

Sociologie et anthropologie de Marcel Mauss, Camille TAROT.
Paris, Éd. La Découverte, coll. Repères, 2003, 123 p.



Le thème du don, associé au nom de Mauss, connaît le même malheureux destin que le thème de l’espace public associé au nom d’Habermas : une pensée largement méconnue, réduite à un cliché qui annule le besoin d’aller voir directement ce qu’il en est. Pour cette seule raison, le petit livre de Camille Tarot, « Sociologie et anthropologie de Marcel Mauss », serait déjà nécessaire pour tout chercheur en sciences humaines et sociales (SHS). Mais c’est également un texte magnifique, bienvenu dans le débat actuel suscité par la crise des structures de la recherche, particulièrement en SHS [....] Le livre n’introduit pas à une œuvre, mais à la pensée et aux travaux d’un homme que l’on regrette constamment de ne pas avoir eu la chance de connaître. Camille Tarot ne propose pas un usage actualisé d’objets anciens, mais une lecture actuelle de l’ambition scientifique et des enjeux de l’engagement dans la recherche sur la culture et la société. Le rapport à l’héritage maussien qui y est proposé n’est en aucun cas une gestion critique et rationalisée d’un patrimoine de concepts, méthodes et courants. Il relèverait plutôt d’une réflexion sur le caractère construit – avec quel courage et quelle opiniâtreté ! – du désir de scientificité, qui n’est pas seulement désir d’objectivation, mais désir d’un mode d’être « total » au sens que le sociologue donne à ce terme.
La lecture de Marcel Mauss proposée ici ne désigne pas a posteriori une « famille » scientifique qui pourrait revendiquer la gestion de son héritage, même si Mauss a loyalement contribué au projet durkheimien de fondation institutionnelle de la sociologie. Il restitue plutôt ce qu’est l’ambition scientifique, à la fois modeste et démesurée, inextricablement liée à une vision politique de la recherche : il s’agit de penser le social, sans rien lâcher de sa complexité, sans se simplifier jamais la tâche parce que le projet scientifique n’est pas de produire des objets intermédiaires, des artefacts, des idées, mais d’essayer de décrire et comprendre. Sans quoi, il n’a aucune valeur. Il suppose du courage, celui qui amène parfois à sortir de l’espace institutionnel pour mieux assumer le projet porté par l’institution, ou à s’isoler de sa famille politique naturelle par fidélité à l’idéal politique lui-même. Marcel Mauss aux prises avec la volonté de son oncle Émile Durkheim, Marcel Mauss admirateur de Jean Jaurès et lucide observateur de la révolution russe, Mauss passionné par le mouvement coopératif, Marcel Mauss terriblement éprouvé par la mort d’un grand nombre de ses collaborateurs et amis pendant la guerre… Toute dimension biographique attache le lecteur à la figure de l’homme derrière l’œuvre. Dans le cas présent l’œuvre n’ayant jamais pu acquérir l’autonomie d’un corpus d’ouvrages achevés, c’est dans l’homme qu’on suit encore et encore un questionnement jamais clos, un mouvement toujours vivant, une volonté toujours tendue. Il s’agit de suivre l’homme à l’œuvre, celui qui n’écrivit pas de livres mais enseigna sans cesse, dépensa sans compter son ardeur et son temps, risquant sans relâche sa pensée et sa parole : « Par rapport aux mœurs intellectuelles actuelles, où la publication est de rigueur, et où la moindre idée valable est en général réservée pour l’article ou la monographie qui suivront, il est étonnant, pour tout dire émouvant, de noter quels trésors d’énergie Marcel Mauss a dépensés dans son enseignement aux Hautes Études » (James Clifford, Malaise dans la culture. L’ethnographie, la littérature et l’art au XXe siècle, Paris, Éd. de l’ENSBA, 1996).
Marcel Mauss est bien plus qu’un chercheur au sens fonctionnel de professionnel de la production de discours scientifiques. Toute sa vie désigne l’exigence infatigable de cohérence entre l’engagement humain, familial, professionnel, intellectuel, politique, au prix de sacrifices qui laissent perplexe à l’heure d’une rationalisation de la production scientifique sur un modèle gestionnaire qui ne doit plus guère à l’exigence de compréhension. Marcel Mauss n’a jamais achevé sa thèse, contre la pression permanente d’Émile Durkheim, parce qu’il pensait ne pas avoir la documentation ethnographique suffisante pour répondre à ses questions. Mais il n’abandonne rien de ce qu’il entreprend dans sa thèse. En tant qu’enseignant, il élaborera une méthode de collecte ethnographique qui aurait été celle qui lui aurait permis de disposer des descriptions complètes dont il aurait eu besoin pour son propre travail. Pouvons-nous aujourd’hui entendre les leçons de ce courage scientifique ?
Il n’y a rien de plus émouvant et d’important que de revenir à un travail de pionnier : on y trouve toujours plus que ce qui en a été gardé. Nous sommes habités par une représentation des processus quels qu’ils soient, selon laquelle les débuts – si géniaux soient-ils – sont grossiers et balbutiants et évoluent nécessairement vers des démarches de plus en plus affinées et complexifiées. Or, cette logique – peut-être sous-tendue par une valorisation excessive des enjeux de production et d’organisation –, s’avère souvent fausse concernant la recherche en SHS. C’est pourquoi Camille Tarot met bien en évidence le fait qui frappe tout lecteur de Marcel Mauss : à l’heure actuelle, ce que nous tentons difficilement de penser comme horizon possible pour les SHS au-delà des réductionnismes méthodologiques, à savoir la saisie des articulations entre différents registres de significations, entre différents ordres de phénomènes observables et entre différentes échelles temporelles, c’est ce que Marcel Mauss et ses proches posaient d’emblée comme objectif. Cet objectif, si mal assumé dans le débat sur « l’utilité des sciences humaines et sociales » consiste à penser la dimension symbolique. Cette dimension n’est en rien un horizon perpétuellement révéré et désigné pour mémoire, mais soigneusement maintenu hors des cadres de production de la connaissance, grand fétiche des SHS qu’elles cachent bien souvent avec embarras. Il est ce qui organise les constructions théoriques et empiriques, voire les dynamiques institutionnelles que Marcel Mauss et ses collègues discutent et modifient sans relâche.
C’est pourquoi le texte de Camille Tarot commente des aspects du travail du sociologue qui ont une résonance particulière dans la communauté des sciences de l’information et de la communication. En effet, l’un des problèmes qui tenaille la communauté est celui de l’articulation entre médiations techniques et médiations symboliques, telle que posée en particulier par Louis Quéré dès 1982, dans Miroirs équivoques. Aux origines de la communication moderne (Paris, Aubier Montaigne). Si nous sommes tous d’accord pour considérer l’échange social comme une interaction toujours médiatisée par du symbolique, alors la constitution des phénomènes de communication en objet d’une communauté scientifique spécifique n’a d’intérêt que si nous ne nous situons jamais en deçà des exigences qu’implique cet énoncé. Lisons Camille Tarot lorsqu’il rappelle la manière dont Marcel Mauss et Émile Durkheim diffèrent relativement aux signes et symboles. Le premier opère « une sécularisation de la notion pour l’étendre à toute médiation de sens socialisée et socialisante » (p. 100). Tout symbole n’est pas simplement relié à son référent, il renvoie à d’autres signes, il « forme des réseaux, des “sociétés” de signes. Cette organisation en réseau légitime de le rapprocher du langage » (p. 100). Camille Tarot relève d’ailleurs un passage capital de l’introduction que Claude Lévi-Strauss consacre à Sociologie et anthropologie de Marcel Mauss, dans lequel il souligne « le caractère révolutionnaire de l’idée selon laquelle l’échange est le commun dénominateur d’un grand nombre d’activités sociales » et appelle l’émergence d’une vaste science de la communication. L’ombre du structuralisme – si mal compris, si mal critiqué – a longtemps masqué la portée de cet appel.
En définitive, on retiendra les lignes consacrées à la pensée socioéconomique de Marcel Mauss, dans lesquelles Camille Tarot s’engage à son tour dans une prise de position où la parole du chercheur est indissolublement liée à son engagement, comme chez celui qu’il cite : « Il est seulement à craindre que la critique du libéralisme par Mauss n’ait pas plus d’échos immédiats que n’en eut, il y a quatre-vingts ans, sa critique du bolchevisme alors triomphant. Faudra-t-il que passent deux ou trois générations et peut-être quelques catastrophes ? En attendant, tous ceux qui ne renoncent pas à l’extension justement mondiale de la démocratie sociale trouveront chez Marcel Mauss un viatique pour traverser le désert » (p. 79).
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dana
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Message par dana »

he bien ! ça fait envie ce texte.. Mon dieu moi qui ait tellement de choses à lire.. arff.. (et si peu d'argent, enfin, heureseument il y a la bilbiothèque online de nos amis québecois :
http://www.uqac.uquebec.ca/zone30/Class ... arcel.html
que me conseillez vous de lire pour commencer ?
Il s’agit de suivre l’homme à l’œuvre, celui qui n’écrivit pas de livres mais enseigna sans cesse, dépensa sans compter son ardeur et son temps, risquant sans relâche sa pensée et sa parole : « Par rapport aux mœurs intellectuelles actuelles, où la publication est de rigueur, et où la moindre idée valable est en général réservée pour l’article ou la monographie qui suivront, il est étonnant, pour tout dire émouvant, de noter quels trésors d’énergie Marcel Mauss a dépensés dans son enseignement aux Hautes Études »
ça ça me travaille.. Ce qui me plait d'ailleurs chez de Clérambault, Lacan ou Wittgenstein, lesquels n'écrivaient pas à proprement parler de livres (bien qu'on les lise en définitive, comment faire autrement ?)
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LLB
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Message par LLB »

Dana Merci pour le lien,
Il faudrait que je lise moi aussi Wittgenstein, Lacan, mais je préfère lire ici, trop la flemme, est-ce grave?
Ton long post sur le don appelle une longue réponse, mais qui est très difficile car on a envie de mobiliser des choses un peu personnelles, puisque tu le fais d'une manière qui le rend si intéressant. Tu évoques d'emblée les relations entre ascendants à propos du don, et en effet, je crois que les relations à mes enfants sont l'espace imaginaire du don. Je ne sais pas comment ça se passe de leur point de vue pour mes enfants, deux garçons adolescents, mais de mon point de vue en tous les cas bien, comme on peut dire que c'est bien quand on est amoureux. Je ne sais pas si ça sera toujours comme ça, je ne sais pas si un jour je ne serai pas la mère dont on parle au psy pour s'en débarasser enfin, mais là, tout de suite, bien. Ce que j'aime chez les enfants : cette espèce de grâce avec laquelle ils reçoivent avec une manière d'être digne des choses et du monde. J'aime cette manière d'être au monde à sa place, sans se soucier de ce que ça dérange ou de ce que ça déplace comme un chat qui s'installe, insoucieux de sa propre beauté. Le corollaire c'est qu'ils sont prêts à considérer leurs parents comme doués d'autant de grâce pour recevoir et être digne d'occuper autant de place qu'il faut, sans qu'on se bouscule pour autant dans des espaces étriqués. Ca me fait mal les parents qui reçoivent peu ou mal de leurs enfants, et qui ne leur donnent qu'en leur signalant le "sacrifice". J'aime mes garçons parce qu'un jour ils n'étaient pas là et un jour le monde s'est réorganisé avec eux dedans et en tant que parent, je suis essentiellement et pour toujours le témoin de ce passage et de la manière dont ils se sont installés dans le monde. Je crois que quand on est amoureux c'est un peu différent : ça marche parce qu'on a l'impression de recevoir tellement plus que ce qu'on donne, et c'est ce sentiment qui fait retrouver cette dignité dans la manière d'être à sa place dans le monde comme un arbre ou un moucheron, sans avoir à se justifier. Ca me fait plaisir de parler de ça parce que c'est ce qui est lumineux alors que le reste ne l'est pas : être amoureux, être des enfants, avoir des enfants. C'est pourtant donné à tout le monde, et manque de pot c'est tellement insuffisant, puisqu'on assiste à cette quête harassante, de siècle en siècle, pour autre chose toujours. J'ai depuis un moment un espèce de pressentiment cauchemardesque : ce vers quoi on marche, c'est la tentative d'éradiquer l'amour, qui est ce qui dérange la mise en marché du monde, qui est une conversion d'absolument toutes les valeurs et tous les biens, une désymbolisation . Je m'égare un peu, mais je ne suis pas certaine que l'amour soit ce truc éternel indestructible indépedant de toute idéologie. A propos des relations père/fils, une question : je me suis souvent dit que dans la religion chrétienne, le don du fils par le père était quand même un truc terrifiant, il écrase totalement les débiteurs sous le poids d'une dette infinie. Mais Camus dans un de ses bouquins (la chute?) se demande ce que le christ a ressenti quand il a appris qu'on massacré tous les nouveaux nés de Judée à cause de sa naissance : lui aussi est en dette par rapport aux hommes, et en particulier, sa propre génération, le don divin n'est pas si asymétrique qu'on le dit.
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dana
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Message par dana »

ce vers quoi on marche, c'est la tentative d'éradiquer l'amour, qui est ce qui dérange la mise en marché du monde, qui est une conversion d'absolument toutes les valeurs et tous les biens, une désymbolisation
tu devrais vraiment lire le dernier oulbekk
c'est exactement de ça dont il cause
je me suis souvent dit que dans la religion chrétienne, le don du fils par le père était quand même un truc terrifiant, il écrase totalement les débiteurs sous le poids d'une dette infinie
oui c'est terrifiant
et d'un autre côté, avec une dette en bagage d'entrée de jeu, ta voie est toute tracée : travailler à la sueur de ton front, rendre grâce, enfanter etc..
et c'est comme tu dis une dette infinie : faut bien ça pour mettre à genoux 2000 ans d'hommes.
La vie est moins compliquée qu'en l'absence de ce signifiant : il y a comme dit lacan un trait unaire, un truc qui te relie, dont une communauté se soutient.

c'est toujours prétentieux de croire qu'on vit un bouleversement radical de ce qu'est l'homme. Mais après tout, on peut bien croire ce que l'on veut, si ça aide..

En tous cas, on doit être parmi les premières générations (là ici dans nos sociétés occidentales démocratiques d'aujourd'hui) à vivre avec ce défaut du lien unaire, sans dette.
D'où l'émergence probable d'un nouveau type de psychose, moins spectaculaire que les psychoses d'autrefois (car il fallait du cran pour délirer et halluciner je crois), ce que certains lacaniens (la cause freudienne) nomment assez justement : psychose ordinaire.
(en présentant tous les symptomes cliniques, je suis assez à même d'en parler mais qu'importe)

ça n'a jamais été simple qu'un père défaille, mais là, c'est toute la symbolique du père qui défaille, et on doit inventer quelque chose de nouveau.

C'est pourquoi je suis heureux de te lire, parce que je crois que ce dont nous avons besoin (ce dont en tous cas pour ma part je ne saurais me passer) c'est la parole, ou pour rester dans ton registre : le verbe, de la femme (et note bien que je parle ici de la position d'être femme, si bien que je conçois qu'on puisse parler en cette position bien qu'ayant un truc qui pendouille entre les jambes :)

quant à l'amour, si on veut bien arrêter de faire les durs, c'est bien de ça dont on parle non ? (y compris revenons-y l'auteur de l'APPEL)
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patman
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Message par patman »

Les croyances en berne, les utopies en crise, la cellule familiale en lambo, les prètes, les députés, les parents et le diable abscent, je crois Dana ki va yavoir de plus en plus de monde chez les psy...il (notre société réclame) nous faut des spécialistes, des experts afin de supporter l'insupportable.

"le coeur d'un monde sans coeur et l'esprit d'un monde sans esprit"de Marx, 8) tention...sa vous change de skywalkers, hein ?


"Pour revenir à l'ascétisme et aux mystiques, je ne sais pas quoi dire à part que personnellement en tout cas, je suis fascinée par ceux qui procèdent en essayant d'être le moins possible, qui tentent de ne pas avoir besoin d'affirmer une existence par l'exercice d'un pouvoir quelconque ou la fabrication de quelque chose. Mais en fait, ce qu'ils faisaient c'est vivre entièrement et continûment ces états qu'on a quand on aime, car l'amour est la seule force absolument subversive qui fait comprendre les choses du simple fait d'être en vie, et quiconque a été amoureux sait cela. Et bien les mystiques de l'âge d'or, pour moi ce sont des gens qui renoncent à tout pour ne pas perdre leur seul occupation : être amoureux. Et si nos sociétés sont suicidaires, c'est qu'elles tentent peut-être de s'attaquer à la forteresse de l'état amoureux, et on sera mort le jour où l'idéologie marchande aura fait en sorte de supprimer les mystérieuses conditions qui rendent dangereusement possible à tout moment l'amour de l'amour. "
LLB
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Message par dana »

je crois Dana ki va yavoir de plus en plus de monde chez les psy...il (notre société réclame) nous faut des spécialistes, des experts afin de supporter l'insupportable.
ben de fait il y a de plus en plus de monde chez les psys
et chez les médecins
et chez les psychologues, les psychiatres, les psy machins
mais là faut faire le tri
enfin moi c'est fait , et je parle d'expérience étant un bon (ou un mauvais parce qu'il y en a qui en ont chié quand même) client.

comme vous l'avez deviné je suis un fervent défendeur et aologue de la psychanalyse freudienne dans sa relecture lacanienne.
donc, faut pas trop me causer des behavorioriste des neuro-psychiatres, des médecins qui vous refilent des neuroleptiques sur la foi d'une consultation d'un quart d'heure (je plaisante pas : la plupart des psychotropes, 80 % des psychotropes , sont délivrés par des médecins généralistes, un neuroleptique par exemple, ben ça vous décoiffe la tête ce truc, c'est pas de la gnognotte, c'est pas du haschich, c'est mille fois plus puissant)

ce qui est très grave, c'est la popularité des thérapies purement chimiques, qui visent à nous faire croire qu'on peut régler tous les problèmes qui nous agitent à coup de médocs. Je suis sur que les 3/4 de la population de ce foutu pays tiennent le coup (et encore) grâce à des substances de ce genre. ET les autres regardent Patrick Sebastien et J.P Pernoud et chassent le moineau le dimanche matin.

Bref : c'est, tout SAUF la parole
(or, je vois pas en ce moment qui peut s'en réclamer à part eux, de la parole)

et dis toi bien qu'un psychanalyste n'est en rien un expert (c'est justement ce dont les accusent les neurospsychiatres dans ce brulot qu'est le livre noir de la psychanalyse, acusation stupide puisqu'aucun psychanalyste digne de ce nom ne se prétend expert en quoi que ce soit)

bref bref bref, je lance un brûlot là
je sais bien que c'est pas vien vu la psy dans certains milieux mais bon tant pis

quand à supporter l'insuportable faut ben se dire que parfois on en peut pas
qu'on peut pas tout
c'est pas une histoire de lacheté ni de courage

Donc oui, il y a de plus en plus de monde qui prend des médocs
de moins en moins de psychanalystes, de moins en moins de parole
ça se cause sur le net parfois
et après ?

comme dit drone on fait quoi en 2007 si sarko le pen passent ?
les djeunes vont faire des manifs dans la rue et oublier deux semaines plus tard à cause des exams du bac et parce que c'est l'été que c'est cool l'été sur la plage ?

les autre iront voir leur médecin qui leur refilera un machin qui va les détendre

tout le monde sera bien détendu sauf les arabes et les blacks qui eux se feront taper sur la gueule à la moindre apparition ?
et les rmistes qu'on enverra faire les esclaves à la place des saisonniers polonais dans les champs d'asperges du languedoc ?
les mecs qui auront de la tune, les intellos friqués iront faire leurs kékés en s'exilant pour des raisons éthiques dans les universités américaines ? Les autres, les intellos pauvres retrouveront les asiles psychaitriques d'où jamais ils n'auraient du sortir ?

ainsi tout rentrera dans l'ordre
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LLB
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Message par LLB »

comme dit drone on fait quoi en 2007 si sarko le pen passent ?
les djeunes vont faire des manifs dans la rue et oublier deux semaines plus tard à cause des exams du bac et parce que c'est l'été que c'est cool l'été sur la plage ?
les autre iront voir leur médecin qui leur refilera un machin qui va les détendre
tout le monde sera bien détendu sauf les arabes et les blacks qui eux se feront taper sur la gueule à la moindre apparition ?
et les rmistes qu'on enverra faire les esclaves à la place des saisonniers polonais dans les champs d'asperges du languedoc ?
les mecs qui auront de la tune, les intellos friqués iront faire leurs kékés en s'exilant pour des raisons éthiques dans les universités américaines ? Les autres, les intellos pauvres retrouveront les asiles psychaitriques d'où jamais ils n'auraient du sortir ?
ainsi tout rentrera dans l'ordre
On retombe sur l'Appel et sur le problème "comment cultiver la non-action quand il y a le feu",mais comment ne pas serrer tous les noeuds coulants par des actions qui contribuent toutes pour le moment, banlieues, SNCF, à durcir brutalement ce contre quoi elles ont surgi. Ce matin à la radio, annonce simultanément du plafonnement de l'impôt et de la proposition d'une taxe d'habitation pour les gens de la route. Comme a écrit Francis Mer dans une interview ily a quelques mois à propos ,des "blocages de la société française" : "il faut que les pauvres participent à l'effort collectif de modernisation de la société". Epargnons les "niches fiscales" mais détruisons les niches en carton des SDF, les niches des RMIstes profiteurs, les niches des gens de la route qui ne paient pas la taxe d'habitation. Comment faire, maintenant que l'Ennemi est partout anonyme dans le grand Ventre Mou où nous sommes immergés, beurk.
Est-ce qu'on pourrait envisager de remettre en marche la désobéissance civile? Les mouvements sont dissous, plus trop de leaders ou de structures pour la porter, mais puisqu'on ne veut justement pas de leaders ou de structures d'organisation de la contestation sur des bases qui reproduisent ce contre quoi elle s'exerce.....
Est-ce qu'on ne pourrait pas cher Présidictateur ouvrir ici une rubrique où on relaterait des actes de refus individuels ou microcollectifs, soit les notres, soit ceux d'autres, habituellement inutiles ou identifiés comme relevant de l'incompétence ou des "problèmes" de la personne, mais qui trouveraient là un autre cadrage? Un journal du refus ordinaire. Ca nous donnerait peut-être plus de force au quotidien, et plus de légèreté. Il faut vendre la peau de l'ours pour le tuer : pour le moment je ne suis pas particulièrement fière de mes petites démissions quotidiennes alors quand j'arrive à dire non ou merde, j'aurais besoin de trompettes et discussions pour tenir la distance et ne pas se rabattre dans les doutes sur ses propres zones d'ombre et sur le danger d'amertume, qui prolifèrent en cas d'isolement de mauvaises relations et le stress qu'elles génèrent.
Qu'importe au fond les zones d'ombres individuelles pourvu qu'il y ait un sens collectif, mais pas trop collectif, collectif pour des personnes qu'on respecte ou qui nous inspirent.
Je propose ça pour discussion et surtout parce que je ne suis pas douée pour imaginer des dispositifs pertinents.
Pour moi ce serait comme une prolongation de la Nuit des Meutes, dans l'idée, qui est rudimentaire pour le moment.
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