la médiation culturelle vient d'être effacée de la liste des

Désobéissances et micro-résistances.

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pH
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Message par pH »

https://secure.avaaz.org/fr/petition/Mi ... u/?kUoWWgb

comme je connais un peu ceux qui sont à l'origine de cette formation dans les années 80 et qu'ils m'envoient ça, je fais tourner. Et en effet, je suis un peu sur le cul d'apprendre qu'on a rayé la médiation culturelle des champs d'études universitaires...

Le Lion doit avoir un avis là dessus aussi, non ?
Nous appelons à reconstruire les masters de médiation culturelle

Nous venons d’apprendre que la médiation culturelle vient d’être effacée de la liste des diplômes universitaires. D’un coup d’un seul ce sont 20 ans de travaux liant étroitement citoyens, artistes, professionnels et universitaires qui disparaissent. 20 ans d’une bataille qui a réussi à inscrire les publics au cœur de l’action culturelle. 20 ans d’efforts pour réconcilier les théories et les pratiques portées par l’Education populaire et celles des professionnels
de la culture. Pas seulement de la culture instituée et défendue par le ministère du même nom, mais la culture au sens large, celle portée par les citoyens, le monde associatif, les amateurs qui œuvraient tous ensemble à ce que chaque culture soit reconnue, travaillée appropriée.

La médiation a su trouver sa place aussi bien dans la reconnaissance de cursus diplômants que dans les cadres d’emploi tant des collectivités territoriales que de l’Etat. Aux côtés des artistes, des administrateurs, des conservateurs, des chargés de communication, les professionnels de la médiation sont devenus ces spécialistes des populations visées par le projet de démocratisation culturelle. Nous avons réussi à faire reconnaître qu’il était essentiel pour toute institution patrimoniale et de création (musées d’art, de sciences, d’histoire et de société, monuments historiques, bibliothèques, archives, centres d’art, centres de culture scientifique et technique, centres d’architecture et d’urbanisme, théâtres, centres chorégraphiques, orchestres, etc.) que des professionnels accompagnent les publics dans leurs démarches d’appropriation.

Ce n’était pas simple ! Nous avions constaté que la démocratisation culturelle ne pouvait être laissée aux producteurs des œuvres, des créations, des savoirs, car ceux-là ont déjà fort à faire pour inventer, chercher, créer. Nous savions aussi qu’il ne s’agissait pas seulement de communication ni de marketing et qu’il fallait veiller à ne pas assimiler les œuvres à des « produits » commerciaux. Nous savions qu’il y allait de la justice et de l’égalité entre tous si l’on voulait éviter que seuls ceux qui étaient déjà dotés d’un fort capital culturel se sentent concernés par les arts, les savoirs scientifiques et la culture. Nous avons voulu former des spécialistes qui auraient pour tâche d’intéresser les personnes à ce que produisaient les artistes et les chercheurs. Nous avons inventé et développé la « médiation culturelle », un ensemble de métiers qui travaillent à diminuer l’écart entre les publics et les œuvres, qui font cet indispensable travail de transmission. Ce travail ne relève pas seulement de l’école mais de toutes les institutions de culture, petites et grandes, qui maillent le territoire national et aujourd’hui le territoire immatériel de l’Internet.

Cette fonction s’est imposée au point que les musées ont reconnu son utilité en l’inscrivant dans la loi « Musées » de 2002. Alors que les besoins sont immenses, pourquoi supprimer aujourd'hui ces formations qui savent préparer les professionnels, dans tous les champs disciplinaires, aux enjeux et aux pratiques de transmission informelle ? Comment faire aboutir la réforme des rythmes scolaires et l’instauration d’un parcours d’éducation artistique et culturelle pour tous les élèves sans faire appel à ces professionnels qui savent faire converger les besoins de l’école et les ressources des équipements culturels ? Faut-il cesser de former des médiateurs alors que se multiplient les dispositifs de sensibilisation et de transmission pour lesquelles les artistes ou les scientifiques ne sont nullement préparés ? Va-t-on laisser seuls les enseignants face à ces missions, alors qu’ils ont pu constater l’utilité et l’importance des savoir-faire de ces nouveaux professionnels ? Va-t-on purement et simplement abandonner d’immenses territoires dans lesquels n’existent que de petits équipements culturels aux moyens affaiblis par les restrictions budgétaires ? Où vont pouvoir se former tous ces jeunes qui veulent mettre en place des projets culturels, auprès des publics « empêchés » parce qu’ils sont dans des établissements fermés (l’hôpital, la prison), sont enfermés dans la maladie ou le handicap ou parce qu’ils n’y ont jamais eu accès et n’ont pas de famille pour les y inciter?

Sans doute cette jeune profession, qui figurait sur la liste des « nouveaux métiers, nouveaux emplois » soutenus par l’État en 1997 (autant dire au siècle dernier) était-elle encore à préciser dans ses misions, ses compétences, ses savoir-faire et ses références (sociologie, histoire de l’art, communication, psychologie sociale, etc.). Mais c’est précisément par cette ouverture, cette faible institutionnalisation qu’elle pouvait affirmer son rôle d’interface et d’attention pour tous les publics, d’intermédiaire efficace.

Plus encore, elle préfigure de nouvelles façons de transmettre, car elle a été le lieu où pouvaient se construire de nouvelles pratiques de formation, d’éducation, de sensibilisation. Les lieux culturels, petits et grands, non contraignants, ouverts à tous, mettant à la disposition de tous les savoirs et les productions de toutes les populations (pensons aux écomusées ou aux orchestres amateurs) reposent sur ces compétences variées qu’il est indispensable de maîtriser pour que fleurissent les projets culturels qui sont indispensables à la construction de chacun, dans le souci de l’autre.

Est-ce faute d’avoir pris conscience de l’importance de la médiation culturelle que le ministère de l’enseignement supérieur a pris la décision de supprimer ces diplômes ? Jusqu’où fallait-il simplifier ? Les professionnels de la médiation et les chercheurs ont-il pu se faire entendre ? C’est pourquoi nous demandons tant au ministère de l’Enseignement supérieur qu’au ministère de la Culture de reconstruire les mastères de médiation culturelle. La liste parue au Journal Officiel du 11 février 2014 page 2414 - texte n° 21 - Arrêté du 4 février 2014 témoigne d’un repli sur les disciplines traditionnelles, oublie des champs culturels importants (la photographie et le design par exemple), et positionne la médiation du côté des sciences, en la mêlant à l’information. Or la médiation n’est pas de l’information.

Si la médiation culturelle reste absente des nomenclatures de formation, comment sera-t-il possible de former les professionnels des services des publics dans les secteurs du patrimoine et de la création ? Comment seront formés ceux qui mettent la science en culture ? Va-t-on assister à un retour en arrière, avec des publics qui ne seront plus accueillis ? Oublie-t-on enfin que la qualité des médiations dans les institutions culturelles est pour beaucoup dans leur réussite et dans leur rayonnement, auprès de nos concitoyens et auprès d’un public plus lointain, celui des étrangers qui viennent en France ?

Tous les pays développés ont de tels professionnels, et ils sont souvent au même niveau de responsabilité que les conservateurs (les scientifiques) et les gestionnaires. C’est loin d’être le cas dans notre pays. En restaurant les mastères professionnalisant et de recherche à la médiation culturelle, la France pourrait affirmer qu’elle ne renonce pas à mettre les publics et les populations au centre du travail des institutions culturelles. Elle donnerait ainsi un contenu à l’affirmation toujours répétée et jamais concrète de la dimension culturelle de sa démocratie.

16 février 2014
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Re: la médiation culturelle vient d'être effacée de la liste

Message par drÖne »

Si ce n'était que cet intitulé qui avait disparu, ça serait déjà tragique. Mais il y en a des tas d'autres, tout aussi importants, qui ont été effacés sans concertation par la ministre. C'est l'ensemble du secteur des Lettres et des Sciences humaines et sociales qui est menacé dans son existence même. Visiblement, le ministère ne veut plus que des formations professionnalisantes du type marketing, bizness, etc. Tout ce qui inscrit une réflexivité et une vision critique de la société dans les cursus doit disparaitre. Et comme les universitaires ne se sont pas remis (et ne se remettront pas avant longtemps) de l'échec des luttes de 2009 contre la réforme LRU (du gouvernement Sarkozy), réforme qui a été reprise et amplifiée par le gouvernement Hollande, je crains que ça ne soit la fin d'une certaine idée du savoir dans ce pays.

Bienvenu dans l'université 2.0, au service du marché, de actionnaires, et des politiciens locaux...
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Re: la médiation culturelle vient d'être effacée de la liste

Message par pH »

la pétition au fait : https://secure.avaaz.org/fr/petition/Mi ... u/?kUoWWgb
drÖne a écrit :Mais il y en a des tas d'autres
ce serait bien de les recenser précisement pour en faire une liste exhaustive (qui doit peut^tre exister qque part ?)

oui, c'est pareil au lycée, ou l'élève de seconde n'a pas le choix des enseignements d'exploration censés être optionnels (!!??) : il DOIT obligatoirement choisir Sciences Eco et Sociales ou Principes Fondamentaux de l'Economie (néolibérale) et de la Gestion (du patrimoine financier des 5% les plus riches de la planète). Que traduisent ces choix en terme d'éducation à la citôoyèèènnnetay ? Personne n'a bronché ou presque quand la réforme a pondu cette abomination. Et les profs chargés de ces enseignements "fondamentaux" osent encore se pointer dans la salle des profs... La réforme a fait des heureux du côté des fans de la gestion et du libéralisme économique.

Rien n'empêche de continuer à résister, ce que je fais tous les jours quand j'en ai l'occasion.
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Re: la médiation culturelle vient d'être effacée de la liste

Message par drÖne »

L'ampleur de la destruction de la diversité intellectuelle, culturelle et scientifique des formations universitaires est énorme, et avait été annoncé par G. Fioraso, quand elle avait indiqué que pour les raisons de "lisibilité des cursus", l'objectif de son ministère était de supprimer 5800 spécialités (donc les intitulés, les thèmes généraux) de masters.
Actuellement, d'après le nouveau décret (http://www.legifrance.gouv.fr/affichTex ... 0028583174), il reste une centaine d'intitulés de formation disponibles (je n'ai pas compté). Le début de la liste des "mentions" (ce qui remplace les "spécialités", qui ont été supprimées) est assez évocateur...

Analyse et politique économique.
Monnaie, banque, finance, assurance.
Econométrie, statistiques.
Economie.
Economie appliquée.
Economie du développement.
Economie du droit.
Economie de l'entreprise et des marchés.
Economie des organisations.
Economie internationale.
Economie sociale et solidaire.
Economie et management publics.
Economie du travail et des ressources humaines.
Economie de l'environnement, de l'énergie et des transports.
Economie de la santé.
Economie industrielle et des réseaux.
Management et administration des entreprises.
Administration économique et sociale.
Administration et échanges internationaux.
Comptabilité - contrôle - audit.
Contrôle de gestion et audit organisationnel.
Finance.
Marketing, vente.
Management.
Management stratégique.
Management et commerce international.
Management public.
Management sectoriel.
Management des PME-PMI.
Management des systèmes d'information.
Entrepreneuriat et management de projets.
Management de l'innovation.
Gestion de production, logistique, achats.
Gestion des ressources humaines.

[beuar.gif]

Le MEDEF doit être content de la place laissé, dans les cursus, à l'idéologie libérale et manageriale. Et comme c'est à l'université que s'élaborent les savoirs disciplinaires qui, ensuite, vont alimenter les programmes de formation des lycées et collèges, on voit vers quoi notre gouvernement souhaite orienter la société française.

Ensuite, évidemment, à l'intérieur d'une mention, on peut toujours (pour le moment) mettre les cours que l'on souhaite, et installer des visions critiques, érudites, et réflexives dans les marges qui restent : c'est là que les résistances peuvent encore se développer. Mais quelle régression !
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Re: la médiation culturelle vient d'être effacée de la liste

Message par pH »

drÖne a écrit :dans les marges qui restent
sabotons les salles de sciences eco en bétonnant les serrures. Ca fera un prix de reviens-moi à ajouter à nos marges.

Le prof est un loup pour le prof...

ta liste fait froid dans le dos :sm10:

à mettre en balance avec les disciplines passées à la trappe lors de la loi LRU...
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Re: la médiation culturelle vient d'être effacée de la liste

Message par pH »

http://www.esperado.fr/Sergitron.html

Un pote a mis au point un génietron, qui permet de se rendre compte des compétences acquises de nos nouveaux diplômés en monitoring culturel.

Les phrases peuvent s'apprendre par coeur en 5 minutes et elles constitueront l'essentiel du contenu théorique qu'un jeune cadre pourra débiter toute une carrière, promotions comprises et espérées grâce à ce savoir hyper opérant sur le salarié moyen.

Au moins, ça coûte moins cher à l'Etat, les facs d'aujourd'hui.

Vu l'efficacité du nouveau dispositif, l'étudiant doit payer des frais de scolarité assez cher pour disposer de cette formation professionnalisante-minute. Et les places sont limitées.

Ne faîtes pas circuler ce document, il en va de l'avenir de nos grands professeurs.
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J'ai mieux :

[/video]
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Message par pH »

[mortderire.gif] je connaissais, oui, c'est excellent
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