Les dangers des nanoparticules sont encore mal connus

Ici, on discute des sciences de la nature, mais aussi des sciences humaines et sociales.

Modérateurs : drÖne, LLB

Répondre
Avatar du membre
drÖne
Présidictateur
Messages : 7766
Enregistré le : 05 oct. 2002, 22:35
Localisation : Présidictature de Drönésie Orientale
Contact :

Les dangers des nanoparticules sont encore mal connus

Message par drÖne »

Les dangers des nanoparticules sont encore mal connus

LE MONDE | 05.12.06 | 13h47 • Mis à jour le 05.12.06 | 13h50

Faut-il avoir peur d'entrer dans la civilisation du nanomonde ? Depuis quelques mois, rapports d'experts et articles scientifiques se multiplient, qui pointent les dangers, pour la santé et l'environnement, de la fabrication et de l'utilisation d'objets de taille nanométrique.

L'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset) estimait, en juin, que "les études toxicologiques, in vitro et chez l'animal, sont encore très peu nombreuses mais établissent l'existence de risques potentiels de toxicité". Début juillet, le Comité de prévention et de précaution (CPP), placé auprès du ministre chargé de l'environnement, mettait en garde : "De multiples arguments indiquent l'existence d'une réactivité particulière des nanoparticules en rapport avec leur très petite taille. Cette réactivité cellulaire et tissulaire peut constituer un danger pour l'homme si celui-ci est exposé par inhalation, ingestion ou passage transcutané." En octobre, c'était au tour du comité d'éthique du CNRS de prôner une "vigilance éthique et sociale".

Lexique

Micro ou nano. Alors que les microtechnologies cherchent à ciseler la matière de façon toujours plus fine, par exemple pour la fabrication de circuits intégrés, les nanotechnologies - du grec nannos (nain) - partent des atomes pour les assembler entre eux. On parle de nanomatériaux jusqu'à la taille de 100 nanomètres, soit 100 milliardièmes de mètre.

Naturelles ou artificielles. Les nanoparticules sont présentes en abondance dans notre environnement, qu'elles soient d'origine naturelle (volcanisme, incendies, érosion, embruns) ou artificielle (industrie, combustion automobile).
La toxicité de certaines nanoparticules artificielles - telles que les particules diesel - est établie.
[-] fermer

C'est que les nanotechnologies ne sont plus cantonnées aux salles blanches des laboratoires. On trouve déjà - sans presque jamais le savoir - des nanoparticules dans de multiples objets ou produits de notre environnement quotidien : des nanotubes de carbone (cent fois plus résistants et six fois plus légers que l'acier) dans les raquettes de tennis et les vélos, des nanoparticules de dioxyde de titane dans les peintures et les crèmes solaires, de noir de carbone dans les pneumatiques, de cérine dans les carburants, de silice dans les vernis des automobiles ou produits lave-vitres, d'argent dans certains cathéters médicaux...

Les fabricants de textiles modifient leurs fibres à l'échelle nanométrique pour leur conférer des propriétés anti-taches, les rendre infroissables ou améliorer leur confort thermique. Des firmes agroalimentaires commercialisent des nanocapsules permettant une meilleure diffusion des nutriments dans les tissus humains. L'industrie pharmaceutique cherche à améliorer l'absorption et l'efficacité de médicaments par une granulométrie nanométrique. "Entre 500 et 700 produits disponibles dans le commerce contiennent des nanoparticules", estime Patrick Brochard, toxicologue au CHU de Bordeaux et membre du CPP. Et le marché est appelé à exploser dans les prochaines années.

Tout le problème vient de la très petite taille des particules en jeu. A l'échelle du nanomètre - un milliardième de mètre, soit dix fois la taille d'un atome -, on entre dans un nouvel état de la matière, aux propriétés chimiques, électriques et magnétiques radicalement neuves. La proportion d'atomes disposés à la surface d'un objet ou d'un composant nanométrique est naturellement plus élevée que pour un objet de taille supérieure. Et ces atomes de surface, qui ne sont pas liés à d'autres atomes, sont plus réactifs. C'est précisément ce qui confère aux nanoéléments les propriétés - dureté, résistance, adhésion ou répulsion... - recherchées par les industriels.

Or ces minuscules particules peuvent franchir des barrières corporelles réputées inviolables : la barrière alvéolocapillaire, la barrière hématoencéphalique, voire la barrière placentaire. "Le dioxyde de titane de certains produits cosmétiques par exemple, habituellement considéré comme amorphe, devient réactif en dessous de 100 nanomètres. S'il pénètre sous la peau, il provoque un stress oxydant des cellules qui entraîne une réaction inflammatoire des tissus", décrit Patrick Brochard. Des nanoparticules inhalées peuvent "se déposer au fond de l'appareil respiratoire, passer dans le sang et se diffuser dans tout l'organisme".

Même si les études scientifiques sont encore très lacunaires, des expériences menées sur des souris font apparaître des réactions inflammatoires des poumons, des parois des vaisseaux sanguins et du cerveau. "Ces résultats ont été obtenus avec des concentrations de nanoparticules beaucoup plus élevées que celles auxquelles l'homme est susceptible d'être exposé, précise le toxicologue. Il est donc impossible d'affirmer qu'il existe un risque sanitaire. Mais, en extrapolant de l'animal à l'homme, on peut être inquiet."

La même inquiétude prévaut s'agissant de la dissémination de ces particules dans les écosystèmes. Plutôt qu'un moratoire, chercheurs et experts préconisent un encadrement strict de ces nouvelles filières industrielles, assurant la traçabilité des nanomatériaux, depuis leur fabrication jusqu'à leur élimination.

Dans la revue Nature du 16 novembre, une quinzaine de scientifiques énoncent plusieurs "grands défis" à relever pour promouvoir des "nanotechnologies responsables". Ils préconisent le développement d'instruments de mesure de l'exposition aux nanomatériaux présents dans l'air et l'eau, de méthodes d'évaluation de leur toxicité, ainsi que de modèles prédictifs de leur impact sur l'environnement et la santé humaine. Autant dire que tout reste à faire.
Pierre Le Hir
Et béh... on va finir par se rendre compte que les "lanceurs d'alertes", qui prennent la parole pour dénoncer, par exemple à Grenoble, les investissements colossaux dans les nanotechnologies avaient raison de s'interroger. Pour en savoir plus, voir le site plutôt bien documenté et très critique de Pièces et Main d'Oeuvre sur les arrières plans (industriels, économiques, sécuritaires, sanitaires, etc.) des nanotechnologies. Le site est centré sur le cas grenoblois de Minatech, le trust scientifico-industriel dédié aux nanotechnologies et à "l'innovation".

+A+
drÖne
d'où, chose remarquable, rien ne s'ensuit...
Répondre