Je ne vous ai pas encore signalé ce merveilleux film soviéto-cubain de Kalatozov, sorti en 1964, que je considère comme l'une des plus belles œuvres cinématographiques de tous les temps. Au départ, c'était prévu pour être un film de propagande destiné à célébrer la révolution cubaine. Mais le réalisateur a complètement explosé les codes de genre du cinéma didactique de propagande communiste pour réaliser un ovni total d'une beauté formelle telle qu'il a été très mal perçu à Cuba ou en URSS, tout en étant interdit de diffusion aux USA : un film rapidement tombé dans l'oubli, donc. Et pourtant on y trouve, à mon sens, les plus beaux mouvements de caméra de toute l'histoire du cinéma : notamment des plans séquence hallucinants et dont je ne comprends toujours pas comment ils ont été réalisés techniquement. Et qui, de plus, font sens avec la narration : pas de gratuité formelle, c'est vraiment du cinéma, pas de l'esbroufe technique de foire. L'image en noir et blanc est également fantastique. La narration décrit la révolution cubaine en commençant par la période de la dictature et des liens de Cuba avec la mafia états-unienne et en poursuivant par l'agitation étudiante, la répression des mouvements de contestation, puis la guérilla castriste jusqu'à la prise du pouvoir à La Havane. Mais l’ambiguïté et une sorte de surréalisme règnent dans le film dès le début, dans la mesure où il ne se contente pas de condamner frontalement le colonialisme ricain : il propose dans le même temps une vision très hédoniste du Cuba d'avant Castro, et des boites de nuits à La Havane où des prostituées dansent avec des golden boys ricains dans une ambiance de fête primitive sauvage et psychédélique, ce qui a du donner des boutons au régime.
Dans la dernière partie du film, la moins réussie, le réalisateur semble avoir voulu donner quelques garanties à la censure pour éviter d'être envoyé au Goulag pour trahison bourgeoise... Mais même avec cette partie un peu plus lourdingue, le film mérite franchement son classement dans le top 10 du cinéma mondial. Il a été restauré en 1995, et o, le trouve à pas cher en DVD.
Quelques extraits, pour vous donner le ton des travelings en plan séquence démentiels et de la plastique du film :
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Soy Cuba
Modérateur : drÖne
Re: Soy Cuba
Merci ! Je vais voir comment je peux trouver ça .