Il fait chaud et on va tous crever

Ici on discute de thèmes environnementaux : écologie scientifique et/ou écologie politique, décroissance, etc.

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drÖne
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Message par drÖne »

Dans la série "ne vous demandez pas si vous allez crever, demandez vous à quel point ça sera dégueulasse", ou "pour sauvegarder la terre, détruisons-là grace à la science", cet article est pas mal je trouve pour ouvrir ce week-end festif :
Il est urgent de sauver les sols
LE MONDE | 21.06.08 |


Daniel Nahon est professeur de géochimie à l'université Paul-Cézanne d'Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône). Grand connaisseur des fragilités de la Terre, il tire la sonnette d'alarme. "Les sols n'en peuvent plus. Nous sommes au bord de l'abîme et, si cela continue, il y aura des famines", s'emporte-t-il. A force de pollution industrielle, de pesticides à hautes doses, d'urbanisation forcenée, d'érosion, de déforestation et d'irrigation mal contrôlée, près d'un quart des terres utilisables dans le monde, en effet, sont déjà dégradées. Et leur proportion par habitant se réduit comme peau de chagrin, quand il faudrait doubler la production agricole, d'ici à 2050, pour nourrir 9 milliards de Terriens.

"Il règne à ce sujet un véritable illettrisme, une méconnaissance de la structure et du fonctionnement des sols, tant chez les politiques que dans les médias, et même chez de nombreux scientifiques, poursuit le géochimiste. Alors qu'il faudrait fournir un véritable effort de guerre pour affronter le défi à venir !" Lassé de l'indifférence quasi générale sur cette question cruciale, Daniel Nahon a publié L'Epuisement de la terre, l'enjeu du XXIe siècle (Odile Jacob). Il y rappelle que le sol cultivable, qui a permis à l'homme de passer du stade de chasseur-cueilleur à l'agriculture, a mis des milliers d'années pour se constituer.

Il a fallu pour cela que la roche mère se décompose, puis qu'elle soit fertilisée par le lent travail des plantes et des bactéries. Non renouvelable, ce patrimoine devrait être considéré comme un bien mondial à protéger. D'autant plus précieux qu'en l'état actuel de nos connaissances techniques, on ne peut se passer des sols pour les cultures.

Pays riches, pays pauvres, pays émergents : la détérioration des sols touche toutes les régions du globe. Certaines parties de la Chine et de l'Inde connaissent d'importants problèmes d'érosion et de pollution. Au Brésil, les sols gagnés sur la forêt amazonienne s'appauvrissent. Christian Valentin, directeur d'une unité de recherche à l'Institut de recherche pour le développement (IRD), précise que cette dégradation touche plus particulièrement deux régions : les sols sableux du Sahel, très peu fertiles et sensibles à l'érosion éolienne, et les sols de montagne des pays d'Asie du Sud-Est. Dans les deux cas, l'extension des aires cultivées s'est faite aux dépens des jachères, des forêts ou des zones de parcours, éléments protecteurs des sols.

Enrayer ce déclin ? Ici ou là, quelques initiatives vont dans ce sens. Au Burkina Faso, par exemple, une poignée de paysans remettent au goût du jour les techniques agricoles traditionnelles (Le Monde du 18 juin). Mais il en faudrait beaucoup plus pour que les sols se stabilisent. D'autant que, dans ce domaine, l'Europe occidentale, et notamment la France, a aussi du souci à se faire.

Rien que dans l'Hexagone, "l'urbanisation - routes et villes - provoque à elle seule la disparition de 60 000 hectares de bonnes terres arables par an", explique Dominique Arrouays, directeur de l'unité Infosol à l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) d'Orléans (Loiret). "Cela représente en dix ans l'équivalent d'un département français !", dit-il. A cela s'ajoute l'érosion, que va inévitablement amplifier la montée en puissance des phénomènes météorologiques extrêmes. Une seule pluie très forte, si elle survient sur une zone en pente, suffit en effet à faire disparaître 50 tonnes de terre... Avec, à terme, un réel danger de désertification.

Face à ce danger croissant, une prise de conscience se fait jour. Mais elle reste bien timide. En novembre 2007, le Parlement européen a adopté une proposition de directive sur la protection des sols, dont la portée a toutefois été amoindrie par une série d'amendements. Les choses sont un peu plus avancées en France, où a été créé, en 2001, le groupement d'intérêt scientifique Sol. Destiné à surveiller la qualité des terres, il a pour but de réaliser un inventaire des sols tous les dix ans pour observer leur évolution, à l'aide d'un maillage systématique du territoire français : 2 000 sites sont déjà en place, et 200 de plus sont prévus d'ici à la fin de l'année. En parallèle sera réalisée une cartographie de la qualité des sols qui devrait être terminée en 2012.

Mais les chercheurs voient déjà plus loin et imaginent d'autres fonctions pour les terres arables. "Jusqu'à présent, celles-ci servaient uniquement de support pour les cultures. Demain, elles devront fournir des services supplémentaires en relation avec la sauvegarde de l'environnement", affirme Guy Richard, directeur de l'unité science du sol à l'INRA d'Orléans. On leur demandera peut-être de lutter contre le réchauffement climatique en piégeant le carbone, de mieux filtrer l'eau, de recycler les déchets urbains ; ou encore de participer au maintien de la biodiversité. Autant de fonctions nouvelles qui pourraient contribuer à un cercle vertueux, puisqu'elles assureraient du même coup la pérennité des sols qui s'y consacreraient.

Pour piéger le carbone, il faudra éviter les labours profonds qui fragmentent le sol, accélèrent la décomposition des matières organiques et libèrent du gaz carbonique. Cela nécessitera de réduire le travail de la terre, qui sera réalisé sur une profondeur plus faible : on se contentera par exemple de semis directs, qui ne nécessitent qu'un grattage en surface pour introduire la graine. "Plutôt que le laisser tout nu entre deux récoltes, on cherchera également à maintenir une couverture permanente du sol", ajoute Guy Richard. Ce qui lui permettra de lutter contre certaines maladies et contre la pollution - à l'instar de ce que l'on observe avec les plantations de moutarde qui, organisées entre les périodes de culture du blé et du maïs, permettent de piéger les nitrates provenant de la décomposition végétale après récolte.

Apprendra-t-on également, dans un avenir proche, à orienter l'activité microbienne des sols afin d'améliorer la filtration de l'eau ? A analyser les terres pour repérer les plus propices au recyclage des déchets ? Dans tous ces domaines, les recherches doivent encore être poursuivies. Mais il est aussi des solutions plus classiques pour préserver les sols. Diminuer les pesticides, laisser sur place les débris végétaux, étudier le paysage pour limiter l'érosion en fonction du relief... Des solutions qui ne demandent pas d'efforts gigantesques, mais simplement un peu plus d'égards vis-à-vis de ce manteau d'arlequin qui nous fait vivre. Même si, pensent les plus alarmistes, les meilleures mesures de protection ne suffiront pas à nourrir l'humanité d'ici à 2050.

Pour relever ce défi, "plusieurs sauts technologiques majeurs seront nécessaires", estime Daniel Nahon. Et l'on ne pourra éviter, selon lui, l'utilisation des plantes transgéniques. Les seules à permettre les cultures sur les sols arides et salés, malheureusement de plus en plus nombreux.
Christiane Galus
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Chaosmose
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Message par Chaosmose »

Un climatologue de la NASA accuse les pétroliers de "crime contre l'humanité et la nature"

LE MONDE | 25.06.08 | 12h38

Jeudi 23 juin 1988, sous une canicule inédite, le climatologue James Hansen témoignait devant une commission parlementaire du Congrès des Etats-Unis. Ignorant les précautions affichées à l'époque par l'ensemble de la communauté scientifique, il annonçait être certain à "99 %" que le climat terrestre était entré dans une période de réchauffement provoqué par les activités humaines.


Très médiatisée, l'intervention est demeurée dans les annales comme l'entrée du changement climatique dans le débat public… Invité par des représentants démocrates, lundi 23 juin, à s'exprimer à nouveau devant une commission du Congrès, James Hansen, 67 ans, a réitéré ses avertissements avec aussi peu de réserves qu'il y a vingt ans.

Largement diffusé sur Internet, le texte de son intervention dresse d'abord l'état des lieux des connaissances sur le climat. Selon le directeur du Goddard Institute for Space Studies (GISS) – l'un des principaux laboratoires de sciences climatiques de la NASA –, la machine climatique est proche d'un "dangereux point de bascule". Il faut, dit-il, réformer les pratiques agricoles et forestières, taxer le carbone, établir un moratoire sur la construction de nouvelles centrales à charbon et bannir complètement ces dernières, à l'échelle mondiale, d'ici à 2030.

Le chercheur prédit une élévation du niveau des mers d'environ 2 mètres à la fin de ce siècle si rien n'est entrepris pour limiter les émissions de gaz à effet de serre – estimation très supérieure à celles généralement énoncées.

"L'ALARMISTE EN CHEF"

Surtout, M. Hansen dénonce "le vaste décalage entre ce qui est compris par la communauté scientifique compétente et ce qui est connu par les décideurs et le grand public". Pour expliquer le peu d'actions entreprises depuis vingt ans pour entraver le changement climatique, il met en cause les "intérêts particuliers" privilégiant leurs "profits à court terme".

Le propos est d'une violence inhabituelle. "Des sociétés ayant leurs intérêts dans les combustibles fossiles ont propagé le doute sur le réchauffement, de la même manière que les cigarettiers avaient cherché à discréditer le lien entre la consommation de tabac et le cancer, écrit M. Hansen. Les PDG de ces sociétés savent ce qu'ils font et connaissent les conséquences sur le long terme d'un scénario business as usual'', ajoute le chercheur. A mon avis, ces dirigeants devraient être poursuivis pour crime contre l'humanité et la nature."

En dépit de sa réputation scientifique, James Hansen, surnommé "l'alarmiste en chef" par ses détracteurs, est régulièrement au centre de polémiques. Fin 2007, témoignant devant une commission chargée de statuer sur la construction d'une centrale à charbon dans l'Iowa, il avait comparé les convois de houille aux "trains de la mort" sillonnant l'Europe pendant la seconde guerre mondiale.

En 2005, il avait révélé dans le New York Times que son travail était soumis à une censure politique de l'administration centrale de la NASA, visant à ne pas fragiliser les positions de la Maison Blanche. L'administrateur de l'Agence spatiale américaine Michael Griffin avait démenti qu'un système de censure ait été formellement en place au sein de son administration.

Rendue publique le 2 juin, une enquête interne de la NASA a cependant conclu que "le département des affaires publiques du quartier général de la NASA avait traité le sujet du changement climatique de manière à réduire, marginaliser ou distordre les résultats des sciences du climat".

Stéphane Foucart
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drÖne
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Message par drÖne »

Ah oui, si tu peux le mettre sur Youtube, ça serait cool.

Sinon, un argument qui revient sans arrêt chez certains collègues des sciences dures pour relativiser la portée des arguments sur le réchauffement climatique, c'est que dans les années 70 la communauté scientifique était persuadée qu'on entrait dans une période de refroidissement. En effet, je me rappelle bien de l'argument de l'époque, celui de l'entrée de la Terre dans le "bras d'Orion" de la galaxie. C'était supposé entraîner une glaciation. Mais je n'arrive pas à trouver de référence à ces théories du refroidissement climatique : j'étais jeune à l'époque, et j'ai peut être un souvenir trop vague. Quelqu'un s'en souvient ?
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Message par drÖne »

http://sciences.blogs.liberation.fr/hom ... .html#more
En 2007, le retrait de la banquise arctique fut spectaculaire, pulvérisant tous les records. La perspective d'un océan arctique libre de glace durant l'été n'était pourtant annoncée par les prévisions climatiques que pour la deuxième moitié du siècle. Du coup, certains océanographes révisaient leurs prévisions et estimaient qu'un "point de non retour" (Jean-Claude Gascard, Cnrs) avait été franchi.

L'été 2008 allait-il infirmer ou confirmer cette tendance, révélatrice des transformations géographiques majeures que le changement climatique provoque ?

Au début de l'été, des journaux anglais n'hésitaient pas à annoncer un océan arctique sans glace dès cet été. Annonce prématurée et peu crédible, dénoncée ici. Alors que l'été se termine, il est temps de faire le point. Les images satellites analysées par les océanographes montrent que le retrait estival, s'il n'atteint pas le record de 2007, confirme l'ampleur des changements en cours. Avec une surface totale un peu supérieure à 3,5 millions de kilomètres carrés fin août, la banquise arctique perd près de 2 millions de kilomètres carrés par rapport à la moyenne 1978/2000 à cette date. Et comme l'an dernier, le mythique passage du Nord-Ouest était ouvert à la navigation.
La suite en image ici : http://sciences.blogs.liberation.fr/hom ... .html#more
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Climat : il est temps de cesser de parler de « changement »

Message par drÖne »

http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2585
Climat : il est temps de cesser de parler de « changement » pour décrire une catastrophe, par George Monbiot
13 mars 2009

Il est des circonstances où les euphémismes ne manifestent plus la nécessaire prudence et la suspension du jugement que requièrent l’examen des faits et l’exercice de la raison, mais sont tout simplement l’indice d’un aveuglement, voire d’un refoulement, tant nos catégories paraissent inaptes à décrire le réel. Continuer à utiliser le terme très neutre de « changement climatique » pour nommer ce qui s’annonce chaque jour un peu plus, au fil des nouvelles communications scientifiques, comme la plus grande catastrophe à laquelle l’humanité ait jamais eu à faire face, ne relèverait plus de la prudence, mais bien de l’inconscience. Tel est en tout cas le sentiment de George Monbiot, qui a assisté à la Conférence de Copenhague, durant laquelle les climatologues ont fait état des dernières avancées de leurs travaux. Les recherches les plus récentes remettent largement en cause les estimations - et donc les recommandations - contenues dans le dernier rapport du GIEC qui, contraint par la lourdeur de ses processus de validation, faisait état d’une science déjà obsolète au moment même de sa publication. Que disent ces derniers résultats ? Monbiot résume la situation d’une formule lapidaire : « Plus nous en savons, pire c’est. »

Par George Monbiot, The Guardian, 12 mars 2009

Plus nous en savons, pire c’est.

Les résultats scientifiques communiqués par les climatologues durant la conférence qui s’est tenue cette semaine à Copenhague montrent que nous avons sous-estimé les impacts du réchauffement de la planète sur trois points importants :

• La hausse du niveau des mers au cours de ce siècle pourrait être deux ou trois fois plus importante que prévue, en partie parce que les estimations du Groupe Intergouvernemental d’Experts sur l’Evolution du Climat (GIEC) ne tiennent pas compte de la fonte des glaciers du Groenland. Une telle élévation aurait de graves conséquences pour les villes côtières, les terres agricoles et les réserves d’eau douce.

• Une élévation de température de deux degrés dans l’Arctique (qui se réchauffe beaucoup plus rapidement que le reste de la planète) pourrait déclencher une activité bactérienne massive dans le sol de cette région du monde. Avec la fonte du pergélisol, les bactéries peuvent dégrader les matières organiques qui ont été emprisonnées dans les glaces et produire des milliards de tonnes de dioxyde de carbone et de méthane. Cela pourrait enclencher l’une des plus puissantes boucles de rétroaction positives au monde, où le réchauffement produirait encore plus de réchauffement.

• Une élévation de quatre degrés la température pourrait provoquer une quasi disparition des forêts tropicales humides de l’Amazonie, ce qui aurait des conséquences effroyables pour la biodiversité et les conditions météorologiques de cette région, avec pour résultat de nouvelles émissions massives de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. Les arbres sont essentiellement des « bâtons de carbone » humides. Lorsqu’ils pourrissent ou brûlent, ils produisent de l’oxyde de carbone. C’est là une autre de ces rétroactions climatiques qui semblent avoir été sous-estimées dans le dernier rapport du GIEC.

Outre la réaction de panique presque animale qui m’a saisi à la lecture de ces rapports, deux faits m’ont sauté aux yeux.

Le premier, c’est que les gouvernements s’appuient sur les évaluations du GIEC qui sont obsolètes depuis des années avant même leur publication, et ce en raison de la prudence extrême des processus de validation et des règles de consensus mis en oeuvre par le GIEC. De ce fait, ses rapports revêtent une grande importance scientifique, mais cela signifie aussi que lorsque les politiques les utilisent comme guides pour déterminer quelles réductions des gaz à effet de serre sont nécessaires, ils sont toujours en retard par rapport aux évènements. C’est sûrement là un arguments fort en faveur de la publication chaque année par le GIEC de rapports intermédiaires, offrant un résumé des avancées de la science et de leurs implications pour les politiques mises en oeuvre au niveau mondial.

Le second, c’est que nous devons cesser de parler de changement climatique. L’utilisation de ce terme pour décrire des événements tels que ceux-là, avec leurs conséquences dévastatrices sur la sécurité alimentaire mondiale, l’approvisionnement en eau et les sociétés humaines, reviendrait à qualifier une invasion étrangère de « visite inattendue », ou un bombardement de « livraison non demandée ». Réchauffement climatique est un terme ridiculement neutre lorsqu’il s’agit de décrire la plus grande catastrophe potentielle à laquelle l’humanité ait jamais eu à faire.

Je pense que nous devrions l’appeler « effondrement climatique » . Quelqu’un a-t-il une meilleure idée ?
Publication originale The Guardian, traduction Contre Info
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oliv
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M'en fous, je vais etancheifier ma maison et mettre des hublots d'ou on pourra observer la faune marine...Image
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Re: Il fait chaud et on va tous crever

Message par drÖne »

A quelque chose, malheur est bon, si il y a plus de canicule, il y aura mécaniquement moins de vieux. Le problème, c'est que les vieux qui souffriront le plus des prochaines canicules, ça sera nous...

:evil:
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Message par drÖne »

http://blog.mondediplo.net/2009-05-04-L ... climatique
Les armées face au réchauffement climatique

mardi 5 mai 2009, par Philippe Leymarie

A son tour, le milieu de la défense en France se préoccupe des conséquences géostratégiques du réchauffement climatique. Un récent colloque [1] a permis d’en lister un certain nombre :

- accroissement des tensions dans des zones déjà fragilisées ;
- fréquence accrue des occurrences de conflits ;
- sur-militarisation et tentation de prise de contrôle ou de limitation d’accès à des zones stratégiques (détroits, océan Arctique) ;
- crispations autour des gisements de ressources énergétiques, aux réserves de plus en plus limitées ;
- intervention croissante des armées dans des missions humanitaires ou d’aide à la gestion de crises, etc.

Parmi les éléments mis en valeur au cours de ce colloque :

- le raidissement actuel autour de l’Arctique, longtemps sujet « congelé » (Inuit, Ours) et « impensé de la géopolitique », mais devenu un des « must », en raison du recul de la banquise qui suscite de nouveaux appétits (« La bataille du grand Nord a commencé ») ;
- la rareté croissante de l’eau, notamment dans les zones urbaines denses, avec, par exemple, une baisse de 4 à 5 mètres par an du niveau des nappes phréatiques dans l’agglomération de Pékin ;
- le retour possible d’une « hydro-diplomatie », autour du partage des eaux des fleuves et rivières (Tigre-Euphrate, Jourdain, Indus, Nil, etc) ;
- les graves conséquences pour l’Asie d’une fonte des glaces de l’Himalaya (inondations).
Réfugiés climatiques Retour à la table des matières

Tout en appelant pour la plupart à ne pas céder au « journalisme de l’épouvante », à ne pas confondre évolution climatique et dégradation de l’environnement [2] et à éviter l’amalgame – souvent décrédibilisant – entre changement climatique et catastrophe, plusieurs intervenants n’ont pas éludé le scénario des « réfugiés climatiques », faisant mouvement par exemple à l’intérieur du continent africain, ou cherchant en plus grand nombre qu’aujourd’hui à pénétrer en Europe. Tout dépend de la quantité, du rythme, de l’intensité de la pression migratoire. Il n’est pas exclu de faire appel à des moyens militaires – même si, a souligné un ancien ministre - « des garde-côtes européens tirant sur des barques, on ne veut pas voir cela ! » [3].

Ces perspectives ont un impact sur l’engagement des forces : dans des conflits de type asymétrique, au cœur des zones habitées (Lire Comment les armées se préparent au combat urbain, Le Monde diplomatique, mars 2009), où les unités doivent disposer d’une capacité autonome en énergie, de moyens de géo-localisation et de communication jusqu’à l’échelle individuelle ; et pour des missions le plus souvent de contrôle, sécurisation, ou stabilisation, plus que pour des missions armées classiques.

Les perspectives climatiques ont également des conséquences sur le « formatage » des unités, avec l’accent mis de plus en plus sur :

- les forces type « maintien de l’ordre », disposant d’un armement non létal, entraînées aux techniques de contrôle de foules ;
- les forces maritimes de surveillance et secours type « garde côtes » ;
- les unités et missions type protection civile, à mi-chemin entre militaires et humanitaires.

Ces perspectives imposent également une meilleure anticipation : lancement de missions prospectives pour une évaluation plus fine des menaces ; étude des moyens et scénarios de riposte, impliquant une révision des accords de coopération, la négociation de partenariats civils et militaires, la mise au point de plans de sécurisation, voire d’intervention, etc. Mais la planification reste un exercice difficile, dans les armées, où les décisions prises en matière d’équipement structurent les moyens et missions pour les 15-20-25 ans à venir…
Prise de conscience Retour à la table des matières

En France, dès mars 2006, le Haut Comité français pour la Défense civile (HCFDC) avait organisé un premier colloque à propos de « l’impact des changements climatiques sur la protection des populations ». En 2007, la Délégation aux affaires stratégiques (Das) du ministère de la Défense avait convoqué un séminaire de prospective : « 2040 – évolutions climatiques et enjeux géostratégiques ».

L’Union européenne a également reconnu l’impact profond du changement climatique sur la sécurité internationale. Dans un document de mars 2008, le haut représentant pour la diplomatie de l’Union, M. Javier Solana, préconisait le développement de meilleures capacités européennes de prévention des conflits et d’intervention en cas de catastrophe – une prise de conscience attisée par la vague d’incendies en Grèce, l’année précédente.

Un colloque organisé en mars 2007 par le Triangle Institute for Security Studies (TISS) en Caroline du Nord) avait montré que l’armée américaine étudie elle aussi les répercussions géostratégiques du réchauffement climatique, se préparant à de nouveaux défis (comme la multiplication des conflits de l’eau), à des interventions humanitaires plus fréquentes, ou à une redéfinition de ses propres besoins et nuisances sur le plan énergétique. Le conseil de sécurité des Nations unies avait tenu pour la première fois en avril 2007 une réunion consacrée aux implications politiques et sécuritaires du réchauffement de la planète, la modification des schémas climatiques étant susceptible - selon le secrétaire général de l’ONU – de générer des tensions et les conflits supplémentaires.
Notes

[1] « Conséquences géostratégiques du réchauffement climatique », 9 avril 2009, organisé par le Collège interarmées de Défense à l’Ecole militaire.

[2] Cela fait longtemps que les pays africains, par exemple, sont aux prises avec la désertification et à la déforestation. Et que certains Etats en « faillite écologique » sont de véritables « bombes sanitaires » (choléra, paludisme, sida).

[3] Hubert Vedrine, ancien ministre des Affaires étrangères.
drÖne
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Re: Il fait chaud et on va tous crever

Message par drÖne »

N'est-ce pas, c'est réjouissant ! Et encore, je ne poste pas tout ce que j'ai lu, sinon il faudrait changer le titre de ce topic en "Suicide, mode d'emploi".

:mrgreen: :mrgreen:
drÖne
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Re: Il fait chaud et on va tous crever

Message par drÖne »

Claude Allègre étant le principal (et unique ?) opposant médiatique français au GIEC, l'examen de sa carrière éditoriale, médiatique, politique et scientifique est intéressant pour avoir une idée de la légitimité de ses positions dans la supposée "controverse scientifique" sur le changement climatique. D'où ce copier-coller d'un article de Médiapart repris dans le site de Sauvons l'université.
Notre enquête : au fait, Claude Allègre est-il un si brillant chercheur ? - Jade Lindgaard, Médiapart, 17 mai 2009

Mediapart a une première fois publié cette enquête en mars 2008. Il était déjà question de l’entrée de Claude Allègre au gouvernement. L’article n’a rien perd de son actualité...

Frissons d’inquiétude sur les pentes de la montagne Sainte-Geneviève où voisinent Normale Sup, le Collège de France, sociétés savantes, et laboratoires : on annonce le retour d’« Ivan le terrible », Claude Allègre. Coups de fil stupéfaits, déjeuners mouvementés, regards incrédules, soupirs abattus… L’éventuelle entrée dans le gouvernement Fillon de l’ancien ministre de Lionel Jospin suscite l’exaspération et les craintes d’un milieu déjà malmené par la disette budgétaire et les restructurations en cours. Car le cas Allègre dépasse les désaccords sur la politique de recherche. Il pose aux scientifiques un problème particulier : que faire de cette personnalité ayant bâti sa carrière politique sur une renommée de savant aujourd’hui contestée ?

La controverse de la boule de pétanque et de la balle de tennis

C’est devenu un jeu chez les esprits les plus pointilleux : repérer les erreurs qui parsèment les livres publiés par Claude Allègre. D’une discipline à l’autre, chacun a son favori. Pour Joël Martin, physicien du Commissariat à l’énergie atomique (CEA) aujourd’hui à la retraite, c’est Un peu de science pour tout le monde (2003, 60 000 exemplaires vendus). Il a consigné les méprises les plus flagrantes dans une lettre envoyée à l’auteur et à son éditeur, Fayard. Missive restée sans réponse. Il y a la mauvaise définition du joule, unité de mesure énergétique, pourtant enseignée au lycée ; le mauvais calcul de l’Unité Astronomique qui confond une distance traversée par la lumière en huit minutes et une parcourue en…3, 26 années.

Cette erreur a valu à Claude Allègre le « gluon d’honneur » de Scintillations, le journal de l’institut de recherche sur les lois fondamentales de l’univers.

La liste continue avec une vision approximative de l’atome ; une mauvaise interprétation astronomique : « la lune tourne autour de la Terre parce que cette dernière exerce sur elle une force d’attraction de type gravitationnel », alors que c’est parce qu’elle tourne autour de la Terre que la lune ne tombe pas sur elle malgré l’attraction gravitationnelle. On note encore une définition erronée de la lumière « constituée de sept couleurs fondamentales » alors qu’elle est faite en réalité d’un dégradé de couleurs du violet au rouge. Enumération non exhaustive.

Mais surtout se joue dans cet ouvrage un nouvel épisode de la controverse de la balle de tennis et de la boule de pétanque qui va opposer quatre ans durant Claude Allègre au Canard enchaîné.

Elle débute en 1999, sur un plateau de TF1, quand celui qui est alors ministre de l’Education nationale déclare : « Vous prenez un élève, vous lui demandez : vous prenez une boule de pétanque et une balle de tennis, vous les lâchez, laquelle arrive la première ? L’élève va vous dire : la boule de pétanque. Eh bien non, elles arrivent ensemble ». La semaine suivante, l’hebdo satirique corrige le membre de l’Académie des sciences : le principe énoncé n’est valable que dans le vide total. Dans l’air, « environnement le plus fréquent pour un ustensile sportif », la boule de pétanque touche terre la première.

Surprise, l’échange ne s’arrête pas là. Une autre lettre du ministre s’attire un nouveau démenti de l’hebdomadaire, lui-même suivi en 2003 d’une nouvelle justification par Claude Allègre dans son livre qui relance la discussion sur l’exemple, cette fois-ci, d’une boule de papier et d’un objet lourd. Dans un fax envoyé au Canard enchaîné, le prix Nobel de physique Georges Charpak confirme l’exactitude des propos du journal.

Cinq ans après la parution du livre, et près de neuf ans après la sortie du ministre, on trouve encore en 2008 des sites internet qui calculent la différence de vitesse de chute entre la boule de pétanque et la balle de tennis. Pour Joël Martin, « prise une à une, ces fautes passeraient inaperçues. Mais ce qui est remarquable, c’est la densité d’erreurs par ouvrage, et le refus de les corriger ».

Raymond Pierrehumbert, professeur de géosciences à l’université de Chicago, a corrigé sur le site real climate un autre bestseller de Claude Allègre, Ma vérité sur la planète (2007, 90 000 exemplaires vendus) dans un article cruellement moqueur : "Les chevaliers de la terre plate".

Il y relève lui aussi des erreurs de base : confondre l’imprévisibilité de la météorologie avec la détermination de l’évolution du climat (« J’ai peine à croire que l’on puisse prédire avec précision le temps qu’il fera dans un siècle alors qu’on ne peut pas prévoir celui qu’il fera dans une semaine », écrit l’ancien ministre) ; manifester une ignorance patente des méthodes de calcul du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), prix Nobel de la Paix 2007 ; affirmer que la disparition des glaciers du Kilimandjaro est due à un soulèvement tectonique et non au changement climatique ; contester le rôle du CO2sur le climat en ignorant un siècle de physique des gaz. « Avec sa litanie d’erreurs, d’idées fausses et de déformations de la réalité, il a renoncé à toute prétention d’être considéré sérieusement en tant que scientifique lorsqu’il parle du changement climatique », conclut le chercheur.

Son Dictionnaire amoureux de la science (2005) recèle lui aussi de gros impairs, touchant à des points fondamentaux de la philosophie et de l’histoire des sciences : notion de relativité grossièrement réduite à « tout est relatif » ; erreurs biographiques sur Albert Einstein ; explication inexacte du principe d’indétermination en mécanique quantique ; à propos d’Heidegger, reprise d’une idée reçue selon laquelle il aurait dit « la science ne pense pas » ; mauvaise explication de l’accident de la navette américaine Challenger. Là encore, la liste pourrait se poursuivre.

C’est un dur métier que d’éditer les manuscrits de Claude Allègre. Une correctrice, exigeant l’anonymat et refusant que soit cité l’ouvrage dont elle eut le brouillon entre les mains par crainte de représailles professionnelles, indique certaines des erreurs signalées à Claude Allègre, qui en refusa la correction. Elle souffle aussi avoir dû masculiniser ses commentaires écrits afin de passer pour un homme, pour gagner l’estime d’un auteur goûtant peu d’être corrigé par les femmes.

Expérimentateur remarquable

Autant d’erreurs et d’approximations ont fini par jeter le doute. Que vaut le chercheur Allègre ? Raoul Madariaga, ancien directeur du laboratoire de sismologie de l’Institut de physique du globe (IPG) qu’a dirigé Claude Allègre, qui s’y rend toujours chaque semaine à 71 ans, souligne l’importance de ses découvertes : « Allègre a été un expérimentateur remarquable. Géochimiste, il a développé des techniques qui permettent de mesurer des éléments difficiles à détecter car apparaissant en quantité infinitésimale. Cela a permis de dater l’histoire des roches, de distinguer les pierres volcaniques des météorites. C’est ce qu’on appelle la géochimie isotopique. C’est pour cela qu’il a obtenu le prix Crafoord. » En 1986, le Français reçoit avec son concurrent américain Gerald Waserburg, du California Institute of Technology, ce prix financièrement très bien doté (environ 140 000 euros), créé par l’Académie royale suédoise pour récompenser les domaines scientifiques non couverts par les prix Nobel. Selon son ancien collaborateur, aujourd’hui, « cela fait longtemps que Claude Allègre n’a plus d’activité de chercheur. Dès le début des années 1990, il a fait beaucoup de politique scientifique, formé des étudiants mais a cessé de conduire ses travaux de mesure qui nécessitent un travail quotidien pendant des mois ».

A la fin des années 1980, alors que s’estompe la période la plus créative de ses recherches, Claude Allègre entame une carrière politique et devient conseiller spécial de Lionel Jospin au ministère de l’Education. « A partir du moment où il est entré au Parti socialiste, il a toujours aidé au développement de l’IPG », ajoute Raoul Manariaga. En 1990, l’Institut obtient le statut de grand établissement, qui lui permet de négocier son budget directement avec le ministère, comme une université, et contrairement aux laboratoires de taille comparable à l’IPG. Les mauvaises langues remarquent que, pour asseoir le prestige de l’Institut, Claude Allègre a choisi une stratégie de développement contradictoire avec les grands principes qu’il prône par ailleurs, plaçant l’université au cœur du système de recherche.

« Ce n’est qu’un modèle, ça va passer de mode »

En 1994, se crée un comité anti-amiante à l’université de Jussieu, après l’apparition des premiers cas de maladie professionnelle sur le campus. Un diagnostic conduit sur les bâtiments de l’université recommande la prise de mesures d’urgence. Par ailleurs, un rapport de l’Inserm évalue le nombre général de décès par cancer dû à l’amiante en 1996 à un minimum de 1950, ce nombre étant appelé à croître dans les années futures. Claude Allègre, alors ancien directeur de l’Institut de physique du Globe, l’un des trois établissements du site, entame une campagne contre le désamiantage de Jussieu, au nom du risque minime que représente réellement l’état du bâtiment. A propos de Jussieu, la position de Claude Allègre se fonde sur le refus de « la philosophie du risque ». « Une société qui n’assume pas les risques est une société vouée à la mort car seule la mort est sans risque », écrit-il en 1996 dans Le Point.

Pour illustrer son point de vue, il compare Jussieu aux plages du Nord, qui n’exposent, dit-il, pas plus les vacanciers à la silicose que les étudiants et enseignants parisiens aux pathologies de l’amiante. « C’est une erreur scientifique majeure ! conteste Michel Parigot, chargé de recherche en mathématique à Paris 7, et fondateur du comité anti-amiante. La silicose se compare à l’asbestose, grave affection des poumons causée par l’inhalation d’amiante à haute dose, qui est donc liée à la quantité de poussières dans l’environnement. Ce n’est pas du tout la situation de Jussieu, où existent des risques de cancer, et non d’asbestose, qui sont eux indépendants de la quantité d’amiante dans l’air ». En 1998, le professeur Claude Got rend un rapport au ministre de la Santé, Bernard Kouchner, indiquant qu’à Jussieu, le niveau d’exposition à l’amiante, bien qu’inférieur à 5 fibres par litre, « impose aux yeux des experts un enlèvement rapide et complet ». Pourtant l’ancien ministre écrit toujours en 2007 dans Ma vérité sur la planète que l’amiante à faible dose ne présente pas de danger avéré.

En d’autres occasions, Claude Allègre semble manifester une méfiance vis-à-vis de la théorie et de l’abstraction qui jure avec la culture scientifique. Il s’en prend aux mathématiques (La Défaite de Platon, 1995) : "Va-t-on continuer à recourir aux mathématiques pour calculer ? (...) L’ordinateur va nous conduire à considérer les mathématiques comme un auxiliaire de la science" et"Les mathématiques ne constituent pas à proprement parler une science". Le mathématicien Michel Broué (président de la société des amis de Mediapart) se souvient, à cette époque, « d’un débat auquel nous avions tous les deux participé à propos des mathématiques, au palais de la Découverte : il y avait défendu une conception plus que rudimentaire du matérialisme,à côté de laquelle le Lénine du Matérialisme et Empiriocriticisme apparaît comme un modèle de nuance et de finesse. Au point qu’il avait fini par dire que, ’’ Oui, bien sûr, il l’avait touché, le champ électro-magnétique’’ ».

L’auteur d’un livre traitant de physique quantique – qui préfère garder l’anonymat – se souvient avoir croisé Claude Allègre lors de la remise d’un prix et s’être entendu adresser : « Ce n’est qu’un modèle, ça va passer de mode. » Lors d’un déplacement pour inaugurer la machine franco-italienne Virgo, destinée à mesurer les ondes de gravitation prévues par la théorie de la relativité générale, qu’aucun physicien ne met en doute, le ministre lâche aux chercheurs qui l’accompagnent : « Tout ça, ce sont des conneries de théoricien. » Pour Michel Broué, « Claude Allègre est pour moi doublement a-scientifique : d’abord parce qu’il méprise la théorie, parce qu’il est totalement rétif à la dialectique du concret et de l’abstrait. Ensuite parce que, en tout cas dans la manière dont il pratique la politique, il a tendance à adapter les faits à ses besoins, la réalité à son baratin, ce qui a peu de choses à voir, je dois dire, avec la méthode scientifique. »

« Négationnisme écologique »

Claude Allègre abuse-t-il de son autorité scientifique ? Les propos qu’il a tenus en diverses occasions, contestant le rôle de l’activité humaine dans le changement climatique, lui ont valu de sévères réprimandes de la communauté scientifique. Pour Pierre Joliot, professeur honoraire au Collège de France, membre de l’Académie des sciences, et petit-fils de Pierre et Marie Curie : « Comme Claude Allègre, je considère que la contestation des dogmes dominants est souvent à l’origine des progrès de la science. Cependant, si le scientifique à l’intérieur de son laboratoire doit être laissé libre de contester les dogmes qui dominent sa discipline, il doit impérativement s’exprimer de manière responsable et mesurée devant les médias et devant les politiques. La défense de thèses apparemment révolutionnaires est une manière trop facile de conforter sa popularité. L’attitude de Claude Allègre vis-à-vis du changement climatique me paraît de ce point de vue inadmissible. Toute justification tendant à démobiliser les gouvernements, dont les efforts dans ce domaine sont encore très insuffisants, pourrait avoir des conséquences dramatiques pour l’avenir de l’humanité. »

Edouard Brézin, physicien, ancien président de l’Académie des sciences, estime pour sa part que Claude Allègre

« est capable d’écraser ses contradicteurs sous un argument d’autorité fondé sur son prestige scientifique.Il utilise même des arguments surprenants de la part d’un scientifique. Par exemple, dans ses prises de position sur le changement climatique, il dit : "Je ne crois pas aux modèles." Ce n’est pas un argument scientifique ! Il s’exprime d’ailleurs souvent sur des sujets sur lesquels il n’a jamais travaillé. C’est son droit de citoyen,mais utiliser son prestigepour s’exprimer, comme s’il relevait de sa compétence, sur un domaine qui n’est pas le sien, n’est pas une bonne pratique.Sa célébrité ouvre un large écho à ses propos dans les médias. La science française n’en sort pas toujours grandie. » Encore plus sévère, Pierre-Henri Gouyon, directeur du laboratoire UPS-CNRS d’Ecologie, Systématique et Evolution, voit dans les prises de position de l’ancien ministre un manque de fair-play : « Cela fait des dizaines d’années que les chercheurs qui travaillent sur le climat supposent que l’activité humaine est responsable du changement climatique. Mais ils ont attendu patiemment d’en avoir la preuve (rapport du GIEC) avant de le dire. C’est remarquable. Il est inadmissible qu’Allègre remette tout cela en doute pour vendre un livre. Je suis horrifié. C’est du négationnisme écologique : que la même personne nie en bloc les problèmes posés par l’amiante à Jussieu, l’action humaine sur le réchauffement climatique et les problèmes que posent les OGM, ça finit par faire beaucoup. Il est aveuglé par son idéologie. Le danger qui guette tout scientifique, c’est de ne pas accepter qu’on lui dise qu’on n’est pas d’accord avec lui. »

Bien au-delà du cas Allègre, c’est la confusion créée dans le débat public qui inquiète Hervé Le Treut, directeur du laboratoire de météorologie dynamique de l’Ecole normale supérieure, membre de l’Académie des sciences et expert du GIEC : « Il y a deux écueils importants : sortir le débat scientifique de là où il doit être argumenté et contre-argumenté en détail, et transformer le nécessaire débat contradictoire scientifique en controverse médiatique. C’est toute la difficulté de vulgariser les savoirs. L’enjeu est d’éviter au maximum les débats inutiles et les polémiques qui compliquent l’expression publique d’un débat pas facile à transmettre. Ce qui m’ennuie le plus, ce n’est pas tant qu’Allègre se prononce sur des sujets en dehors de son domaine scientifique, c’est la place que cela a pris. »

Populisme institutionnel

Pour Bernard Legras, directeur de recherche au laboratoire de météorologie dynamique de l’Ecole normale supérieure, « il n’y a rien de plus dangereux qu’un scientifique reconnu dans son domaine qui se croit devenu omniscient, qui se prend pour un Galilée des temps modernes. Tout le monde a le droit d’avoir une opinion mais un scientifique qui s’exprime comme scientifique sur un sujet scientifique ne peut pas s’exprimer sur des sujets auxquels il ne comprend rien. Ce serait une imposture et un abus d’autorité. Le risque, avec Claude Allègre quand il pose au grand chercheur incompris, c’est que des gens qui n’ont pas de formation scientifique croient à ses inepties ».

Le livre que Claude Allègre s’apprêtait à publier chez Fayard ce printemps 2008, mais dont il a suspendu la parution en attendant d’en savoir plus sur son sort gouvernemental, devait s’intituler : Journal d’un anti-Panurge. Au-delà de l’erreur qui se hisse cette fois-ci dans le titre même de l’ouvrage, avec cette confusion étrange entre le berger de Rabelais et ses moutons, l’expression éclaire d’un jour révélateur le parcours du scientifique : à la fois au cœur du pouvoir (ancien ministre de la gauche il a tout de même trouvé sa place dans les cercles sarkozystes), membre de prestigieuses institutions (académies des sciences française et américaine), auteur de bestsellers, mais pourfendant les dogmes dominants. A la fois dedans et dehors. Une carrière institutionnelle parvenue au sommet, et un discours médiatique d’outsider. Ce positionnement paradoxal dessine les contours d’une forme de populisme institutionnel.

Sollicité à plusieurs reprises par Mediapart, Claude Allègre n’a pas souhaité répondre à nos questions.
drÖne
d'où, chose remarquable, rien ne s'ensuit...
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