http://www.liberation.fr/actualite/reut ... 852.FR.php
Il n'en faut pas plus pour que, sur les forums comme dans la presse, la veulerie qui veut que chacun s'incline devant le pouvoir politique sans le discuter se réveille, et avec elle le cortège de tous ceux pour qui les institutions sont forcément des suppots du pouvoir, en bloc, toutes les institutions, et pour qui on ne peut en parler qu'avec le ton du mépris.
Ils disent "la justice est à deux vitesse, la preuve, Chirac n'est inquiété qu'après des années". Oui, mais ils oublient complaisamment que la justice c'est aussi des bâtonniers en grève de la faim contre la réforme de la carte judiciaire. Et ils oublient qu'un juge, c'est aussi un individu seul, qui doit assumer des positions difficiles quand il s'attaque à un homme politique aussi soutenu qu'un président de la république.
Ils disent "ça ne sert à rien, c'est trop tard", oubliant que la justice doit se rendre, tant que les durées de prescription des crimes ne sont pas dépassées, il n'est qu'à voir les réactions lâches de la presse française, qui bêle à l'unisson du conformisme "trop tââârd... trop tââârd..." pour se rendre compte d'où sortent les clichés, stréréotypes, et autres refus idéologiques de soutenir la justice quand elle ne cède pas, elle, à la lâcheté devant le politique :
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0 ... 637,0.html
Perso, je me réjouis de cette mise en examen, je me sens concerné et rassuré par les institutions quand elles sont respectables et courageuses, je remercie les juges d'avoir du cran à notre place et d'assumer ce que toute notre société voudrait oublier, et je souhaite voir Chirac en prison."LE ROI EST NU"
La presse française s'intéresse naturellement bien davantage aux démêlés judiciaires de Jacques Chirac. "Le roi est nu. Il fut un temps, pas si lointain, où il aurait été inenvisageable qu'un ancien président de la République puisse être entendu par un juge, et, a fortiori, mis en examen", analyse Philippe Goulliaud, dans le Figaro. "La mise en examen de Jacques Chirac illustre la fin d'une époque et d'un système", conclut-il.
Qu'ils se réjouissent ou pas de voir la justice faire son office, les journaux sont unanimes à trouver que c'est tard, voire trop tard. Gérard Noël de La liberté de l'Est fait partie de ceux qui pensent que "la justice doit mener à terme cette enquête pour solder enfin toute une période trouble de la vie politique française". Dans L'Est républicain, Pierre Taribo trouve "normal que la procédure suive son cours" tout en mettant "deux bémols". "Vingt ans après, il y a des airs d'acharnement dans cette constance judiciaire", écrit-il avant d'observer que les démêlés de Jacques Chirac avec la justice "affaiblissent la fonction".
Les éditorialistes sont nombreux à croire que "les préoccupations des Français sont bien éloignées de ces histoires anciennes", tel Jacques Camus de La République du Centre. Et de suggérer que "la seule chose qui pourrait grandir [Jacques Chirac] aujourd'hui serait qu'il renonce à siéger au Conseil constitutionnel. En républicain intègre qu'il prétend être". Patrice Chabanet du Journal de la Haute-Marne estime que l'immunité "a pour effet de faire remonter à la surface du très vieux linge sale". Il s'interroge : "Les Français sont-ils interpellés par les agissements de celui qui était patron du RPR il y a plus de vingt ans ?"
Dans L'Alsace, Patrick Fluckiger réfute les "voix [qui] s'élèvent pour amnistier des faits qui sont anciens". Il ne fustige pas le seul Chirac et rappelle que "tous les partis ont leurs cadavres dans les placards". "Pour assainir enfin la vie politique, il est nécessaire de tous les sortir", conclut-il. Jean-Michel Helvig évoque la peine encourue par l'ancien président dans La République des Pyrénéees : "Il ne risque sans doute qu'une peine symbolique – ce qui est déjà çà –, son procès, s'il a lieu, ne devant donner lieu qu'à l'évocation de faits mineurs et oubliés."
Marc Chevanche dans Nice-Matin souligne que la justice est si tardive que "même Arnaud Montebourg, qui fut un des plus virulents tourmenteurs du chef de l'Etat, estime aujourd'hui que ces poursuites viennent bien tard". L'éditorialiste va jusqu'à suggérer que "Jacques Chirac devrait le prendre comme avocat". Michel Lépinay de Paris-Normandie s'interroge : "La France doit-elle s'offrir en guise de catharsis l'opprobre d'un ancien président pour moderniser sa vie politique ?" "Pourquoi pas. A condition qu'on soit bien sûr de laver plus blanc aujourd'hui...", ce dont il n'a pas l'air certain.