L'espace urbain sous contrôle

Désobéissances et micro-résistances.

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drÖne
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L'espace urbain sous contrôle

Message par drÖne »

En charchant des infos sur les bancs de métro monoplaces (qui interdisent aux SDF de s'allonger), je suis tombé sur ce site qui a réalisé un intéressant dossier sur le lien, à Lyon, entre la politique sécuritaire de la mairie et l'aménagement de l'espace urbain :

http://dissidence.libre-octet.org/appre ... rbain.html

Ca rejoint mon envie de réaliser, un jour, un reportage photographique sur la fabrique institutionalisée de l'exclusion. Ne pas en rester à l'analyse de documents sécuritaires tels que celui que dénonce ce site (ce qui est cependant utile et nécessaire), mais aller dans les lieux où se planifie, s'organise et se réalise concrètement la fabrique de l'exclusion : mairies, services d'aménagement urbain, cabinets d'architectes, usines de fabrication de mobilier urbain. Et inetrroger les gens qui y travaillent, pas forcément les dirigeants, mais aussi les salariés et les syndicalistes, sur ce que ça fait de fabriquer l'exclusion au quotidien.

Montrer que le mal est en nous, là, partout, et pas seulement dans l'espace imaginé du Pouvoir avec un grand "P".

Bon, un jour je m'y mettrai peut-être...
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TouF
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Message par TouF »

Vraiment interessant!
Je pourrais presque faire le cobaye drÖnesien!
J'ai fait un peu d'urbanisme dans une agence d'archi, pas en tant que concepteur, seulement comme dessinateur sur des interconnections de transports, mais je n'ai pas vraiment été confronté au fait de fabriquer l'exclusion au quotidien. Mais c'etait plus au niveau du concours où l'on en reste au grande ligne du projet et le peu que j'ai vu en execution, je n'ai remarqué que le choix de bancs dans des stations de tram où tu ne peuts pas t'allonger... ce qui est (hélas) tout à fait naturel de nos jours!
a posteriori, je m'imagine bien dire à l'architecte : "désolé vieux! je refuse d'implanter ce genre de mobilier sur mon plan!" Mouarf! ce serait marrant tiens! :arf: ... j'y penserai, si j'ai l'occasion de rebosser dans cette branche!
On evitait aussi les recoins pouvant servir de pissotieres sauvages ou de coupes-gorges mais sans rentrer dans une logique de paranoia securitaire, on cherche naturellement à créer des espaces ouverts et fluidifier la circulation des personnes.
Juste pour l'anecdote, ya qlq années, j'ai bossé sur les stations du métro du caire, où là on nous disait d'éviter les recoins, parce que comme les stations étaient climatisées, les gens venaient dans les stations et recherchaient ce genre d'endroit pour faire la sieste!
et sinon,
J'ai bossé à la construction du Stade de France en me disant bien que tout ce pognon aurait été plus utile ailleurs, mais ce n'est pas vraiment cela "fabriquer de l'exclusion"... et puis à l'époque je ne me posais pas trop de questions.
Mais je me rappelle bien des murs des bars et des chiottes qui ont été conçus "anti-hooligan"... y en avait de la feraille dans le parpaing!!!
Pour finir je mentionnerai juste mon acte de bravoure (mouarf!) quand j'ai refusé de bosser sur un concours de réhabilitation du pavillon des familles de Fleury-Merogis... :roll:
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drÖne
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Message par drÖne »

N'empêche, si on y réfléchi bien, c'est plus difficile de résister aux pressions ou de s'opposer à tes collègues de bureau, chaque jour, en suivant une ligne "éthique", que de lancer du pavé sur les keufs. Enfin, j'en ai peur : surtout sur le long terme. Sinon, si t'as des infos sur les boîtes qui fabriquent ces fameux bancs, je suis preneur : noms, adresse, etc.

+A+
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Message par drÖne »

Heureusement pour lui, Brassens est mort avant de voir ce que sont devenus "ses" bancs publics.

A ce propos :

http://www.batiweb.com/news/a.asp?ref=0 ... cs-publics
REVES D’ARCHITECTE
Plus d'amoureux sur les bancs publics !
Plus d'amoureux sur les bancs publics !
Tout le problème d'un travail en design avec une entreprise: c'est son cahier des charges, car il faut trouver l'ouverture entre la créativité et les contraintes. D'où ma perplexité devant les nouveaux " bancs " des métros parisiens ou des gares de banlieue … Mais quelles ont été les contraintes données par la RATP ou la SNCF pour la création de ces barres de fer, où nous devons nous appuyer pour attendre la prochaine rame !

Les années 1970 avaient vu fleurir les sièges Motte. Ces coques individuelles orange qui interdisaient de se coucher et qui disposées parfois dos à dos, empêchaient surtout les gens de se parler.

Dans les années 1980, le cabinet Oui Dire est chargé du réaménagement du métro. Bingo ! Nouveau cabinet, donc nouveau concept ! et voici "l'assis debout". Le banc du métro a donc évolué et continué cette progression vers les hauteurs. Il passe aujourd'hui, de "l'assis debout" à celui de "debout debout jusqu'au bout" (y compris durant les grèves)

Mais si les amoureux qui ne peuvent même plus attendre enlacés le dernier métro, ont eux toujours l'alternative d'une chambre, qu'en est il de nos clodos, à la veille de l'hiver. C'est à se demander si le cahier des charges du nouveau design n'avait pas une contrainte de ce type !

"Cette architecture qui se protège de l'indésirable est connue aux Etats-Unis, où elle sévit depuis les années 1970, sous le nom de "defensible space". En France, on l'appelle "architecture de prévention situationnelle", explique le sociologue Jean-Pierre Garnier ". Elle y est même enseignée dans les écoles d'architecture et à l'Institut des Hautes Etudes sur la Sécurité.

Gilles Paté et Stéphane Argillet, artistes plasticiens, se sont voués à la dénoncer : "L'espace de la rue devient d'une violence absolue, accuse le premier. Cela va plus loin que la simple volonté d'expulsion du SDF. Cela touche au rapport du citoyen à l'espace public."

Au fait, dans "service public", n'y a t'il pas "service" et "public" et puis "urbanisme" et "urbanité" n'ont il pas la même racine ?"

Affaire à suivre … on vit vraiment une époque formidable!


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Message par drÖne »

Un autre article sur les bancs anti-SDF :

http://www.actuchomage.org/modules.php? ... e&sid=2430
Un mobilier urbain anti-SDF
Dimanche, 14 Janvier 2007

Le mobilier urbain évolue. Les sans-abri doivent s’adapter... et apprendre à dormir debout.

Dans la rue, une agitation inhabituelle. Un huissier de justice représentant la mairie, des policiers, quelques journalistes, et un collectif de Sans domicile fixe. Le 20 janvier 2006, place du Ravelin à Toulouse, des SDF ont scié un arceau disposé au milieu d’un banc public. Une action symbolique pour protester contre la politique menée par la ville à l’encontre des indésirables. Un «acte de vandalisme, selon la mairie. Les bancs ne sont pas faits pour qu’on s’allonge dessus».

Le message est limpide. Pour la première fois, des élus reconnaissent publiquement la finalité du mobilier urbain actuel. Non pas accueillir les individus dans l’espace public, mais en exclure certains. «C’est devenu systématique, on cherche à cacher la misère», s’insurge Daniel Terrolle. Depuis quinze ans, cet anthropologue enquête sur les conditions de vie des sans-logis : «Sous couvert d’évolution esthétique, on rejette les exclus», dit-il. Aussi, fleurit dans toutes les villes un mobilier urbain «avant-gardiste». Des fontaines dont les jets d’eau arrosent les alentours, des barres circulaires scellées sur les bordures des massifs de fleur, des pics disposés sur les rebords de certaines banques… le dispositif est varié.
«Ça rend l’espace violent. Socialement, ils visent les plus démunis, mais ils sont subis par tous», renchérit Gilles Pathé. En 2003, il a co-réalisé un court métrage intitulé "Le Repos du fakir" dans lequel un personnage tente tant bien que mal de s’allonger sur ces nouveaux composants urbains, devant certains magasins, des bâtiments administratifs et dans les couloirs du métro parisien.

La RATP a justement été pionnière dans la transformation de son mobilier. Aujourd’hui, pour attendre son métro paisiblement, il faut s’installer sur des mini-sièges spécialement creusés pour une paire de fesses et séparés les uns des autres de 60 cm, ou alors contre des appuis tubulaires en métal baptisé du doux nom de «miséricordes». La Régie des transports parisiens assume sa politique. Ses cahiers des charges précisent que le mobilier est fait pour accueillir les voyageurs, et eux seuls. «Nous sommes une entreprise commerciale en compétition avec d’autres moyens de transport, confie Yo Kaminagai, responsable du design. L’attractivité du réseau est très importante. Nous ne voulons pas imposer à la majorité une cohabitation dont ils ne veulent pas. Le métro n’est pas organisé pour que les gens puissent y rester longtemps.»

La RATP est loin d’être isolée dans cette chasse aux indésirables. Municipalités, organismes publics ou entreprises de transports, tous mettent en pratique la théorie de «situation prévisionnelle» imaginée par Oscar Newman dans les années 1970. Selon cet architecte américain, il existe des espaces criminogènes qu’il faut aménager pour endiguer la délinquance. Le mobilier urbain n’est que la partie visible d’une vaste évolution du design urbain censé sécuriser l’espace public. «Par exemple, on arrête de construire des halls traversant dans les grands ensembles qui pourrait faciliter la fuite, explique Jean-Pierre Garnier, sociologue. Les paysagistes dessinent des tracés circulatoires pour faciliter des rondes de police.» Et de conclure : «Les pouvoirs publics ne maîtrisent pas les conditions générales qui favorisent le développement des violences . Alors ils se rabattent sur l’aménagement du cadre bâti. Mais toute démarche qui prétend résoudre des problèmes sociaux en les réduisant à une question de forme urbaine est vouée à l’échec.»
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Message par TouF »

drÖne a écrit :si t'as des infos sur les boîtes qui fabriquent ces fameux bancs, je suis preneur : noms, adresse, etc.
Non, j'ai rien gardé, mais avec une recherche internet ça se trouvé facilement...
drÖne a écrit :N'empêche, si on y réfléchi bien, c'est plus difficile de résister aux pressions ou de s'opposer à tes collègues de bureau, chaque jour, en suivant une ligne "éthique", que de lancer du pavé sur les keufs. Enfin, j'en ai peur : surtout sur le long terme.
ah ouai!
Suivre une ligne éthique quotidienne, j'y crois pas si elle est droite comme la justice. Enfin disons que j'ai pas la carrure!
Surtout que mon éthique est amorale! ;)
Je crois plus à l'action ponctuelle. Pas obligé d'entamer une Guerre des Tranchées! Quand le nombre est en ta défaveur la Guérilla est plus indiquée, ce n'est pas l'efficacité qui compte mais la visibilité de tes collègues qui, pour certains, te regardons et peut-etre t'ecouterons autrement que comme un eternel adolescent rebelle (je parle surtout au sein de ma caste plus que de la tienne).
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Message par drÖne »

TouF a écrit : Non, j'ai rien gardé, mais avec une recherche internet ça se trouvé facilement...

Bah non, malheureusement, j'ai bien essayé, mais ils s'en ventent pas de faire des bancs anti-SDF...
ah ouai!
Suivre une ligne éthique quotidienne, j'y crois pas si elle est droite comme la justice. Enfin disons que j'ai pas la carrure!
Surtout que mon éthique est amorale! ;)
Je crois plus à l'action ponctuelle. Pas obligé d'entamer une Guerre des Tranchées! Quand le nombre est en ta défaveur la Guérilla est plus indiquée, ce n'est pas l'efficacité qui compte mais la visibilité de tes collègues qui, pour certains, te regardons et peut-etre t'ecouterons autrement que comme un eternel adolescent rebelle (je parle surtout au sein de ma caste plus que de la tienne).
Tout dépend les temporalités qu'on prend en compte. L'action ponctuelle, du type "manif", ça ne fait pas changer les choses fondamentalement en ce moment je trouve... Après, c'est bien ce que je dis : c'est bien plus difficile de lutter au quotidien que de se donner des espaces de "militance" qui ont souvent la caractéristique de s'attaquer au Pouvoir (grand "P") et rarement aux pouvoirs (petit "p" et pluriel de "nous tous").
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Message par TouF »

drÖne a écrit :Après, c'est bien ce que je dis : c'est bien plus difficile de lutter au quotidien que de se donner des espaces de "militance" qui ont souvent la caractéristique de s'attaquer au Pouvoir (grand "P") et rarement aux pouvoirs (petit "p" et pluriel de "nous tous").
Malgré tout si je prends l'exemple de Fleury, j'ai informé mon patron que je ne travaillerai pas sur ce concours. Et quand mes collègues qui s'en sont occupé m'ont demandé de leur filé un coup de main car ils etaient en pleine charrette (c'est chronique chez ces gens là), je leur ai gentiment dit que pour ce projet, il ne fallait pas compté sur moi... (alors qu'ils savaient que d'habitude, ils pouvaient compter sur moi)
Est-ce que cela fut efficace?... cela dépend ce que l'on entend par efficace, cela ne les a pas empêchés de déposer le concours à temps...
Est-ce que cela fut une action utile? pour Moi, elle le fut, ça c'est sûr... et je pense que mes collègues ont compris ma démarche.
Est-ce transposable ailleurs?... :?:
Mais j'ai bien compris que la lutte au quotidien dont tu parles est à un autre échelon.
drÖne a écrit :Tout dépend les temporalités qu'on prend en compte. L'action ponctuelle, du type "manif", ça ne fait pas changer les choses fondamentalement en ce moment je trouve...
changer les choses fondamentalement?... ah bah nan ! Je ne vois pas d’autre solution que d’être un nombre certain et vu la mentalité générale de nos concitoyens qui même ceux qui sont conscient (et c’est pas la majorité) optent pour l’adoption du profil-bas…. J’ai toujours pas de réponse à cette question…. A part essayer de faire changer les mentalités petit à petit… mais combien de générations il faudra me diras tu ?!….
et on en revient au point de départ !… tout du moins on déjà eu ici ce genre de discussion
Mais ton projet est d’autant plus intéressant pour prendre conscience de ces petits pouvoirs!
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Message par TouF »

Tiens j'ai trouvé un Banc Anti-Dormeur chez Buton Industrie:
http://www.urbain-mobilier.com/page/sho ... /BancBC133
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Message par drÖne »

TouF a écrit : changer les choses fondamentalement?... ah bah nan ! Je ne vois pas d’autre solution que d’être un nombre certain et vu la mentalité générale de nos concitoyens qui même ceux qui sont conscient (et c’est pas la majorité) optent pour l’adoption du profil-bas…. J’ai toujours pas de réponse à cette question…. A part essayer de faire changer les mentalités petit à petit… mais combien de générations il faudra me diras tu ?!….
et on en revient au point de départ !… tout du moins on déjà eu ici ce genre de discussion
Oui, c'est sans doute vrai. Je suis toujours ambivalent là dessus. En tout cas, tu as eu raison de résister.
Mais ton projet est d’autant plus intéressant pour prendre conscience de ces petits pouvoirs!
Ce serait bien ça le but.
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