du mérite

Désobéissances et micro-résistances.

Modérateurs : drÖne, LLB

dana
The knight who says : "NI !"
Messages : 138
Enregistré le : 19 nov. 2005, 02:12
Localisation : uzbekistan
Contact :

du mérite

Message par dana »

je copie là un texte que j'ai déposé sur mon weblog mais qui pourrait peut-être susciter vos réactions...

---------------------------------

Je lis quelque part : c'est la remise en question de la société fondée sur le mérite ! (dit avec colère et regret par un sympathisant de droite au sujet des aides sociales accordées aux plus démunis qui ne cherchent pas de travail, s' insurgent, et brûlent des automobiles)

Mais qu'entend-il cet homme là par mériter ?
Le méritant est celui dont une certaine morale publique reconnaît l'effort - et au prorata de ces efforts lui serait accordée une certaine gratification. Le mérite, ce ne sont ni ces efforts, ni la gratification, mais un certain calcul par lequel l'évaluation des efforts conduit à l'obtention d'une gratification (qui peut être matérielle, mais aussi une forme de reconnaissance, etc..)

Evidemment, plus on part d'en bas de l'échelle sociale, plus on accumule les déboires, plus on est confronté aux handicaps, plus on a des chances d'être méritant.
Celui qui est né avec tous les atouts propices à la réussite n'a que peu de chance d'être reconnu méritant.

Pour mériter, il faut souffrir. Il faut travailler (plus), s'accrocher (plus), en vouloir (plus ardemment).

Un société fondée sur la moralité du mérite - c'est-à-dire sur une évaluation sociale des efforts, évaluation sur la base de critères pour la plupart non-écrits, qui se modifient au fur et à mesure des fluctuations de l'opinion (on n'a pas le même criterium du mérite dans l'Allemagne des années 30 que dans les Etats-Unis des années 90) - une telle société présente des traits distinctifs assez nets :

1° Le sentiment du juste et de l'injuste est amendé par la considération de la situation particulière de chacun - on pourrait définir cela comme équité si les critères de l'évaluation du mérite possédait une quelconque objectivité, plutôt que d'être déterminés par une vague opinion publique.

2° Symétriquement à cette reconnaissance du mérite, on stygmatise celui qui ne mérite pas (la gratification qui lui est ou pourrait lui être accordée) : ce dernier devrait avoir ce qu'il mérite -c'est-à-dire compte tenu de ce qu'on dénonce chez lui comme paresse, laisser-aller, manque de goût pour l'effort - rien du tout (voire pire)

3° Chacun peut, à l'occasion, se reconnaître pour lui-même un certain mérite - parce qu'il sait combien la vie a été rude, malgré les apparences, parce qu'il connait ses propres angoisses, ses propres doutes : mais l'opinion publique qui édicte les vertus et les vices est seule juge (bien que, je le répète, son jugement ne corresponde à rien d'objectif) : elle ne tient en général pas compte des atermoiements de la vie intérieure.
C'est la raison pour laquelle la dialectique du mérite est une des causes ou du moins une des expressions favorites des névroses.

4° Dans les périodes de grandes crises sociales - où s'accentuent les difficultés à survivre - la moralité du mérite vient teinter les jugements de chacun. Et l'état, s'emparant de ce mot, l'invoque à toutes les sauces et en fait la clé de son programme politique.

Quand comme moi, on a décidé de renoncer à ce jeu du mérite, et qu'on vit dans une société accrochée à ce jeu, on court éventuellement un grand danger : ne cherchant aucunement du travail, tout adonné à ma propre jouissance, m'évitant toute peine inutile, je présente le type même de celui qui ne produisant aucun effort, bénéficie tout de même d'une gratification (une aide sociale). Je rêve parfois qu'un jour dans la rue les passants, découvrant ma situation, excédés, me lapident à coup de pierres. Je songe souvent à ce film de Julien Duvivier, Panique, et à Michel Simon poursuivi par la foule hurlante, je songe à ces femmes tondues et exhibées devant la populace un jour de libération des haines. Je songe que mon tour viendra peut-être.
Image
Avatar du membre
drÖne
Présidictateur
Messages : 7766
Enregistré le : 05 oct. 2002, 22:35
Localisation : Présidictature de Drönésie Orientale
Contact :

Message par drÖne »

Dans le même temps, cette méritocratie explose sur les écrans, où se multiplient depuis Loft Story les jeux de classement dans lesquels les plus "méritants" survivent, et éliminent les moins bien notés. Une version libéral-darwinienne et médiatique de l'Etat Providence, restreinte à un groupe sélectionné en fonction d'un casting précis, administrée par une entreprise, et dont on peut faire l'hypothèse qu'elle accompagne et/ou induit l'état de concurrence généralisée qui s'est instauré depuis quelques années dans tous les domaines de notre société. Là où l'élection "au mérite" reposait sur un consensus démocratique sur les critères de sélection (aider les moins nantis), on a maintenant plutôt l'idée de supprimer du circuit ceux qui ont moins pour favoriser ceux qui ont plus. Les médias comme la TV sont à la fois les reflets et les acteurs de ce changement. Je pense que tout ça est un des multiples symptômes du cancer libéral qui gangrenne tant de cerveaux aujourd'hui...

+A+
drÖne
d'où, chose remarquable, rien ne s'ensuit...
geronimo l'insoumis
djeunz of ze room
Messages : 25
Enregistré le : 15 déc. 2005, 15:25

Message par geronimo l'insoumis »

qu'est-ce que le mérite ? Voilà un vaste sujet de l'éducation nationale.
D'un coté, le point de vue administratif qui veut récompenser l'élève le plus méritant (en général, celui qui a les meilleurs notes et qui fait le moin chier son monde).
De l'autre coté, le point de vue de certains enseignants (pas tous, je vous rassure, ceux que vous avez connu n'étaient malheureusement pas tous comme ça) qui estime que cette notion n'a de valeur que le nom: que penser de cet élève en difficulté totale qui, en ce moment se dit qu'il casserait bien la gueule à ses camarades qui lui rapellent sans cesse que le n^¨el n'est pas le même pour tous; que penser de cet élève qui enfin se révolte contre ses parents professeurs qui lui ont bouffé la vie (enfin, le début); que penser de moi qui critique alors que je fais peut-être partie des trois derniers cas ?
Bah, personne n'est parfais. J'essaie, de mon coté d'être le moins imparfait possible! J'essaie surtout de faire en sorte que ceux ke je cotoie soient moins moutons et je vous jure, à part deux-trois, ya du boulot
dana
The knight who says : "NI !"
Messages : 138
Enregistré le : 19 nov. 2005, 02:12
Localisation : uzbekistan
Contact :

Message par dana »

Je pense que tout ça est un des multiples symptômes du cancer libéral qui gangrenne tant de cerveaux aujourd'hui...
je crois que le sentiment du mérite est plus qu'une simple histoire de libéralisme.. (d'abord parce que le stakhanovisme, c'est pas spécialement libéral :)

Je me souviens quand je bossais à l'usine d'avoir vu toute la chaîne (soit environ une centaine d'ouvriers et d'ouvrières dont j'étais) s'arrêter en quelques minutes pour littéralement CONTEMPLER un ouvrier qui était en train de battre des records de production sur sa machine
Il faisait preuve d'une dextérité sans pareille c'est vrai
et on aurait dit un véritable robot

je crois que le mérite est un mode de calcul simpliste les plus répandus au contraire, qui a à voir avec la justice qu'on aurait à se rendre à soi-même
et pas spécialement un dogme libéral

C'est la raison pour laquelle il est déjà très difficile de passer outre la considération du mérite pour soi-même
observez vous vous-même, et vous verrez qu'à bien des moments vous faites appel à ce genre de calcul

je me suis longtemps plaint d'avoir galéré plus que les autres à l'université du fait de mes origines prolétaires, de mon peu d'éducation, de mon provincialisme etc..

C'est très difficile de ne pas trouver une raison qui explique ce sentiment d'évoir à en faire plus que les autres pour arriver au même point

bien que simpliste, la considération du mérite est en quelque sorte une des premières qui nous viennent à l'esprit : et l'établissement de la socité hobbesienne ou rousseauiste utilisent largement à cet égard ce sentiment comme un levier : ce n'est pas par hasard..
geronimo l'insoumis
djeunz of ze room
Messages : 25
Enregistré le : 15 déc. 2005, 15:25

Message par geronimo l'insoumis »

comment peux tu (si g bien compris) ,méler Rousseau à ton propos ??? Seule la société nous a formé pour devenir des loups ! Dans tous les régimes communautaires, dans tous les villages de campagne, les gens s'entraident sans a prioris. Seules les cités reflètes les philosophies des nantis des cités.
Avatar du membre
drÖne
Présidictateur
Messages : 7766
Enregistré le : 05 oct. 2002, 22:35
Localisation : Présidictature de Drönésie Orientale
Contact :

Message par drÖne »

geronimo l'insoumis a écrit :comment peux tu (si g bien compris) ,méler Rousseau à ton propos ??? Seule la société nous a formé pour devenir des loups ! Dans tous les régimes communautaires, dans tous les villages de campagne, les gens s'entraident sans a prioris. Seules les cités reflètes les philosophies des nantis des cités.
Un peu radical, non, comme avis ? Si tous les citadins étaient par nature des salauds et tous les campagnards, par nature, de braves gens, ça se saurait. Si les cités n'étaient que des refuges de nantis, ça se saurait aussi... J'ai toujours habité en ville : je suis donc un nantis sans solidarité ? Bon, ben alors je me demande ce qui me pousse depuis 24 ans à faire de la musique gratuitement, à la donner pour un public que je ne connais parfois pas, et à entretenir à mes frais ce forum où tu t'exprimes gratuitement.

Quant aux différentes formes de la solidarité, les plus visibles ne sont pas forcément les seules à exister : c'est pas parce qu'en ville on ne voit pas Mme Michu aider M. Boulaouane en lui apportant un sac de pommes de terre de son jardin que Mme Michu n'a pas envoyé son petit chèque au secours populaire ou à médecins sans frontières.

+A+
drÖne
d'où, chose remarquable, rien ne s'ensuit...
Avatar du membre
drÖne
Présidictateur
Messages : 7766
Enregistré le : 05 oct. 2002, 22:35
Localisation : Présidictature de Drönésie Orientale
Contact :

Message par drÖne »

dana a écrit :
je crois que le sentiment du mérite est plus qu'une simple histoire de libéralisme.. (d'abord parce que le stakhanovisme, c'est pas spécialement libéral :)
Très juste !
je crois que le mérite est un mode de calcul simpliste les plus répandus au contraire, qui a à voir avec la justice qu'on aurait à se rendre à soi-même
et pas spécialement un dogme libéral

C'est la raison pour laquelle il est déjà très difficile de passer outre la considération du mérite pour soi-même
observez vous vous-même, et vous verrez qu'à bien des moments vous faites appel à ce genre de calcul
De nouveau, j'approuve.
bien que simpliste, la considération du mérite est en quelque sorte une des premières qui nous viennent à l'esprit : et l'établissement de la socité hobbesienne ou rousseauiste utilisent largement à cet égard ce sentiment comme un levier : ce n'est pas par hasard..
Par curiosité, j'ai cherché dans le TLF la définition de "mérite" :
MÉRITE, subst. masc.
A. 1. Valeur morale procédant de l'effort de quelqu'un qui surmonte des difficultés par sens du devoir et par aspiration au bien. Anton. démérite. Un juste mérite; honorer, récompenser, vanter le mérite; mérite et récompense, mérite et vertu. La notion de mérite et celle de responsabilité sont des erreurs certaines, liées à la croyance erronée à une liberté absolue que nie le déterminisme universel (LE DANTEC, Savoir! 1920, p.81). Pour être méchant, il faut d'abord être bon; et pour être bon, il faut être méchant, sinon le «mérite» s'évapore (VALÉRY, Mauv. pens., 1942, p.112):

1. ... pour qu'une peine soit utile, il faut 1 que celui auquel on l'inflige, pourvu qu'il est du principe du mérite et du démérite, se trouve justement puni et accepte sa punition avec une disposition convenable; 2 que les spectateurs, pourvus également du principe du mérite et du démérite, trouvent le coupable justement puni en tant que coupable, s'appliquent par anticipation la même justice, et soient rappelés à l'ordre par la vue de ses légitimes représailles.
COUSIN, Hist. philos. XVIIIe s., t.2, 1829, p.273.
[À propos d'un attribut mor. de la pers.] J'aime la vertu pour son mérite et non pour sa récompense (LAMART., Voy. Orient, t.1, 1835, p.82).
2. THÉOL. Propriété intrinsèque de l'acte humain bon, en tant qu'il a rapport à autrui, à la communauté humaine et à Dieu, et qui est susceptible d'appeler sur l'homme la miséricorde divine (d'apr. Foi t.1, 1968). Couronner le mérite; le mérite et la grâce. Dieu nous jugera selon le mérite de nos oeuvres (Ac. 1798-1935). Dans un sens, on peut dire que j'ai du mérite. On en a canonisé qui me valaient peut-être pas (AYMÉ, Brûlebois, 1926, p.66). Le mérite dépend de la libre disposit
Le TLF, ça ne vaut pas une bonne vieille recherche étymologico-dictionnariste, mais là je trouve ça intéressant : toutes ces références au colectif, aux valeurs, à la justice, aux spectateurs de la punition, à Dieu, etc., bref, le mérite comme système de classement en tension entre un sens "ontologique" (le mérite intrinsèque de quelqu'un) et un sens relativiste (les échelles de mérite, la comparaison) semble bien lié à pas mal d'aspects de notre culture. aspects âs si méprisables, en fin de compte, et pas si liés au libéralisme, en effet.

+A+
drÖne
d'où, chose remarquable, rien ne s'ensuit...
dana
The knight who says : "NI !"
Messages : 138
Enregistré le : 19 nov. 2005, 02:12
Localisation : uzbekistan
Contact :

Message par dana »

oui
oui
avec ma princesse delphine qui est venue me rejoindre pour quelques jours on se disait tantôt en substance
que le problème n'est pas tant que pour chacun on puisse se reconnaître un certain mérite, c'est-à-dire faire cas de la SINGULARITE de nos existences, de notre histoire à chacun
c'est plutôt qu'on puisse effectivement instaurer une échelle de mérite, qui sert au moins autant à déterminer qui a le plus de mérite et qui en a le moins
or
avec un peu d'expérience de l'existence
on se rend compte qu'il ne suffit pas d'être né pauvre pour avoir du mérite
par exemple
et le pire sans doute c'est de s'entendre dire qu'on n'a aucun mérite à faire ce qu'on fait
qu'en savons-nous ?
c'est un peu comme la souffrance : toute échelle de la souffrance se heurte à la subjectivité de celui qui souffre
c'est une des rares choses, sa souffrance, qu'on n'est pas en droit à mon avis pas évaluer a priori

ce qui est supportable pour les uns ne le serait pas pour les autres
ainsi par exemple, la solitude, une certaine pauvreté etc..

ce qui ne fait pas de celui qui supporte un héros et de celui qui ne supporte pas un lâche

je saute du coq à l'âne mais ça me donne envie de relire Armantya Sen (dont je trouve la pensée sur les libertés comme biens primordiaux vraiment novatrice et réaliste)
comment peux tu (si g bien compris) ,méler Rousseau à ton propos ??? Seule la société nous a formé pour devenir des loups ! Dans tous les régimes communautaires, dans tous les villages de campagne, les gens s'entraident sans a prioris. Seules les cités reflètes les philosophies des nantis des cités.

je te réponds geronimo
je suis d'accord avec drone : vivant en plein montagne, je t'assure que la solidarité se mélange très bien avec le refus de l'autre et le racisme.
Pour Rousseau, dont je suis un admirateur (pas seulement pour ses écrits politiques), si tu lis avec soin ne serait ce le second discours sur les inégalités, on se rend compte que le passage à l'état social ne se fait pas spécialement dans l'amour d'autrui : la solidarité est l'effet d'un calcul.
N'allons pas surtout conclure avec Hobbes que pour n'avoir aucune idée de la bonté, l'homme soit naturellement méchant, qu'il soit vicieux parce qu'il ne connaît pas la vertu, qu'il refuse toujours à ses semblables des services qu'il ne croit pas leur devoir, ni qu'en vertu du droit qu'il s'attribue avec raison aux choses dont il a besoin, il s'imagine follement être le seul propriétaire de tout l'univers. Hobbes a très bien vu le défaut de toutes les définitions modernes du droit naturel : mais les conséquences qu'il tire de la sienne montrent qu'il la prend dans un sens qui n'est pas moins faux. En raisonnant sur les principes qu'il établit, cet auteur devait dire que l'état de nature étant celui où le soin de notre conservation est le moins préjudiciable à celle d'autrui, cet état était par conséquent le plus propre à la paix, et le plus convenable au genre humain.
et plus loin :
Il y a d'ailleurs un autre principe que Hobbes n'a point aperçu et qui, ayant été donné à l'homme pour adoucir, en certaines circonstances, la férocité de son amour-propre, ou le désir de se conserver avant la naissance de cet amour, tempère l'ardeur qu'il a pour son bien-être par une répugnance innée à voir souffrir son semblable.
Tout la réflexion de Rousseau repose sur cette "répugnance à voir soufrir son semblable" qui est innée : c'est sur ce point précis que Rousseau n'est pas Hobbes, ça n'a rien à voir avec un amour de l'autre, dont on se demande bien ce qui pourrait l'engendrer, mais sur la pitié, laquelle sera décrite plus loin comme l'effet de l'identification de l'homme à son semblable souffrant. L'homme à l'état de nature, parfaitement isolé, vient à croiser un autre homme blessé à une jambe. S'il éprouve à ce moment de la pitié, c'est parce qu'il s'imagine qu'il pourrait lui-même être blessé à cette jambe, et en souffre "imaginairement". (ce qui soit dit en passant est très proche de certaines réflexions des psychanalystes sur l'autre comme miroir).

Je ne dis pas que Rousseau soit cynique, et Hobbes non plus d'ailleurs, mais ils sont loin d'être des cathos béâts :)

Et : quant aux loups.. je préfère les loups (il y en eut pas mal par chez moi, et j'adore en chercher les traces)
juko
Hikikomori !
Messages : 1322
Enregistré le : 06 oct. 2002, 17:00
Localisation : ngc224, messier31
Contact :

Message par juko »

ca sappelle l empathie aussi !
dana
The knight who says : "NI !"
Messages : 138
Enregistré le : 19 nov. 2005, 02:12
Localisation : uzbekistan
Contact :

Message par dana »

oui oui empathie / pitié rousseauiste
mais à condition de bien comprendre que c'est une empathie qui en quelque sorte ne sort pas de soi-même, de l'amour propre
C'est plutôt l'illusion d'une véritable empathie (un sentir "dans" l'autre ? dirigé vers l'autre si l'on prend le sens grec, à l'opposé du préfixe "ex") ou pour le dire plus clairement, un mouvement de soi vers l'autre par projection 'en voyant l'autre souffrant, je m'identifie à lui, je m'y projette et je l'introjecte comme dirait les psychanalystes d'obédience kleinienne), puis je reviens à moi ( et en réalité j'ai pitié de moi autant que de lui, ou j'ai pitié de lui dans la mesure où j'ai pitié de moi-même imaginairement souffrant)
ça part de soi-même, ça s'appuie sur l'autre comme miroir, et ça revient vers soi-même.

Tou ça pour rappeler que Rousseau n'est pas le sirupeux idéaliste qu'on imagine souvent (c'est pas Bernardin de saint-pierre si vous voulez , quoique Paul et Virginie soit un roman plus subtil qu'il y parait)
L'efficacité du second discours, c'est tout comme celui du Leviathan, qu'il s'en tient à l'amour-propre, plutôt que de préjuger je ne sais quel amour inné, quel sentiment qui porterait vers l'autre en dépit de soi.
Répondre