Je hais les artistes biotech

Réflexions sur la création musicale et graphique, et sur leur symbiose : mix, Vjing, lives machines, etc.

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drÖne
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Message par drÖne »

qweestion_taag a écrit ::| Heuuuu... Dénoncer ce n'est pas adopter une posture?
Je dirais que la posture consiste à "faire comme si", c'est de la duplicité, du théâtre quoi. Il me semble, mais c'est difficile à prouver, que le Picasso de Guernica dénonçait authentiquement la guerre. Mais il a fait des déclarations pour dire que l'ensemble de son travail n'était que de l'arnaque. Mais peu importe : d'une certaine manière, c'est l'histoire, la critique et le public qui tranchent en matière de goût, du moins qui désignent ce qui est important et ce qui ne l'est pas. Peu importe le jugement des auteurs sur leur propre oeuvre, même si, paradoxalement, c'est le discours des artistes sur leur oeuvre qui a finit par définir l'art contemporain (en déportant l'attention depuis l'objet produit vers le processus de qualification de l'objet par les instances de légitimation : critique, musées, institutions, public, médias, etc.).
La différence entre la Renaissance et l'art dit "biotech" (j'aime pas ce mot) je la vois surtout dans cette histoire de "concept". Je ne crois pas qu'ils en avaient particilièrement à l'âge de la Renaissance. Personellement, je défini l'art d'un point de vue esthétique. Lorsque l'esthétique est délaissée pour le concept, je ne parle même plus d'art.
Bon, je crois que je viens d'énoncer clairement ce qui me pose problème dans le "biotech"! Si devant une oeuvre ou devant la justification de l'artiste devant cette oeuvre je ne vois que du conceptuel, parler d'art "biotech" me parait mal approprié. :?
C'est tout l'art qui émerge à la suite de Duchamp qui n'existe plus que par l'association d'un objet (minoré par l'auteur dans l'art contemporain) et d'un discours, d'un "concept" (mis en valeur par l'auteur et les institutions muséales comme la critique). Du coup, des franges entières des publics habituels des expos d'art ont perdu leurs repères académiques, ceux qui exigeaient qu'on se focalise sur l'objet produit. En soi, je ne critique pas l'art contemporain pour sa démarche conceptuelle, mais tout d'abord pour la raison que cette démarche n'a plus rien de novateur depuis l'exposition du bidet de Duchamp en 1917, et ensuite pour les raisons mêmes qu'exposent les artistes contemporains dans leurs propres discours : leur art est supposé être "social et politique", et c'est cela qui me paraît usurpé dans de nombreuses démarches qui "miment" l'interrogation sociale et politique pour n'adopter que des poses prétentieuses, verbeuses... et rémunératrices.

Le jour où un artiste biotech passera 6 mois dans un labo bossant sur les OGM, puis ira enquêter chez Attac, chez Bové, dans les assos anti-OGM, puis au ministère de la Santé, etc., puis mettra toutes ces observations en forme au sein d'une production esthétique, alors ça commencera à m'intéresser et j'accepterai qu'on me parle d'art "social et politique". mais ça ne sera guère plus que ce que les sciences sociales pratiquent depuis pas mal d'années, sans bénéficier pour autant de la légitimité et du prestige (et de l'intouchabilité !) des artistes...

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qweestion_taag
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Message par qweestion_taag »

drone a écrit : C'est tout l'art qui émerge à la suite de Duchamp qui n'existe plus que par l'association d'un objet (minoré par l'auteur dans l'art contemporain) et d'un discours, d'un "concept" (mis en valeur par l'auteur et les institutions muséales comme la critique). Du coup, des franges entières des publics habituels des expos d'art ont perdu leurs repères académiques, ceux qui exigeaient qu'on se focalise sur l'objet produit. (...)
:) Ben oui, je sais bien... J'ai déjà fait du 100% conceptuel (pour l'option art plastoc au bac). Quand j'y repense, j'ai eu de bonnes idées. Mais très honnêtement, ça aurait été le travail de quelqu'un d'autre, j'aurai beaucoup critiqué la démarche. Je ne dis pas qu'il faut faire purement de l'académique, mais vraiment quand une oeuvre vise seulement à démontrer une idée ou un concept, j'ai du mal. Ce n'est plus de l'art, c'est de la philo!
drone a écrit : (...) alors ça commencera à m'intéresser et j'accepterai qu'on me parle d'art "social et politique". mais ça ne sera guère plus que ce que les sciences sociales pratiquent depuis pas mal d'années, sans bénéficier pour autant de la légitimité et du prestige (et de l'intouchabilité !) des artistes...
L'art "biothèque" est-il vraiement "social et politique"? Je t'avoue que je ne me suis pas vraiement penchée sur le sujet, mais il me semble que ça reste le délire "homme-machine", et plus généralement dans le thème du progrès, non?

Cetylen.
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drÖne
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Message par drÖne »

L'art "biothèque" est-il vraiement "social et politique"? Je t'avoue que je ne me suis pas vraiement penchée sur le sujet, mais il me semble que ça reste le délire "homme-machine", et plus généralement dans le thème du progrès, non?
Les deux (critique ou apologie du progrès et délire "homme machine") semblent aller de pair et être abordé conjointement par les artistes biotech. C'est plus généralement l'art contemporain qui revendique un ancrage dans la critique socials et politique. Il y a peut-être une spécificité des artistes biotech qu'il faudrait explorer plus sérieusement que je ne l'ai fait. Voici déjà quelques citations extraites du dossier de Transfer.net :

http://www.transfert.net/a8556 :
Dans une fiole protégée par une vitre, tel un bijou de valeur, le brésilien Eduardo Kac a recueilli 65 milligrammes d'ADN. Cette poudre blanche obtenue par l'accumulation et le filtrage d'innombrables copies d'un gène de bactérie, promesse de perfection, d'immortalité et de royalties, pourrait symboliser le Graal de la société moderne et marchande. L'artiste a pourtant choisi de mettre en avant son caractère inerte, ironisant sur le fétichisme dont elle est l'objet dans les conseils d'administration et les salles de marché.

"A l'image de cette poudre, nous n'abordons pas les biotechnologies sous l'angle de leur utilité. Nous cherchons à mettre en abîme l'utilisation qui en est faite dans les laboratoires", souligne Jens Hauser, le commissaire de l'exposition. "Au public qui y verrait une simple provocation, les artistes veulent montrer qu'ils lèvent en fait le voile sur un monde clos, celui des laboratoires et des chercheurs", poursuit Marc Grégoire, chercheur à l'Inserm de Nantes, qui assiste le collectif australien Symbiotica sur l'exposition.
Lever le voile sur le monde des chercheurs : quelle prétention ! Ca fait plus de 20 ans que la sociologie des sciences fait ce travail, sur la base d'observations et de publications ! Qoui qu'il en soit, c'est la thématique du progrès scientifique qui est supposée être interrogée par cet artiste-là.

http://www.transfert.net/a8577 :
Le collectif australien Symbiotica expose ses cultures de tissus organiques en tant qu'oeuvres artistiques. Ces artistes qui ont appris des techniques de laboratoires veulent alerter le public sur les questions éthiques que posent la science. [...] Le collectif Symbiotica cherche ici à questionner le public sur l'exploitation du semi-vivant. Leurs "poupées du souci" - agrégats de cellules vivantes, corsetés dans leur cote de fil chirurgical - symbolisent elles aussi les peurs de la société face aux biotechnologies.
Là, la thématique sociale est plus apparente. mais là encore, quelle naïveté que de vouloir "alerter le plublic" : comme si celui-ci attendait les artistes biotech pour s'interroger !!! Non, mais que je sache, on a bien foutu Bové en taule pour arrachage de plans de maïs transgénique : c'est bien que le public s'interroge depuis pas mal de temps, mais comme l'artiste biotech est un autiste prétentieux, il ne peut exister que s'il se met dans la pose du découvreur...

http://www.transfert.net/a8673 :
"Nous sommes dans une logique d'analyse critique mais ne prenons pas forcément partie. Notre idée est de sortir de l'abstraction des discours de laboratoires en présentant au public des éléments concrets, donc marquants, prévient Marion Laval-Jeantet. Le public est choqué de voir des hybrides de nos peaux ainsi exposés. Mais en réalité ce qui choque n'est pas tant la culture - même hybride - de peau, que le fait d'imaginer le monde qui va avec ce genre de technique." Enrôler des humains pour jouer les cobayes de laboratoires à la place d'animaux n'est-il pas un prélude à d'autres techniques ? Celles-ci mettront-elles en cause la notion de barrière entre espèces ? Sont-elles forcément inévitables ou réellement inquiétantes ?
Là, la démarche me paraît plus intéressante, puisque les artistes biotech ont poussé la logique de la faisabilité technique des greffes jusqu'au bout de cette logique du "je peux le faire, donc je le fais". Pour une fois, il y a bien une mini prise de risque (ils ont donné des bouts de leur peau à greffer sur de la peau de porc), ce qui ouvre une brèche dans un domaine ou les lois bioéthiques se cherchent encore. Mais je persiste à penser qu'une observation plus classique, menée depuis les sciences sociales, en dirait plus que ce qu'en tirent les artistes biotech, qui relève d'une observation isolée et de la mobilisation d'un imaginaire (les relations homme animal, la xénogreffe) plus que d'une analyse.

Voilà, y'aurait d'autres citations intéressantes, mais je pense que ça répond déjà un peu à ta remarque.

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qweestion_taag
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Moi non plus je n'aime pas les artistes biotech

Message par qweestion_taag »

Ok, je cerne mieux le délire à présent.
Franchement, ça ne m'inspire rien du tout. Je n'appelle pas ça de l'art. Faudrait que j'invente un mot pour qualifier ça.

Moi non plus je n'aime pas les artistes biotech :twisted:

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Message par Virtual pugilat »

Moi si j'étais biotech, après m'être copieusement paluché le cyber-braquemard je m'amuserais à faire flipper les gens en leur montrant ce qui leur pend au cul ( http://www.syti.net/Targets.html , http://www.syti.net/Implants.html ) mais du coup je leur ferai peur alors je venderai plus rien... Donc je les comprends, ils sont assis sur une mine d'or qui peux leur péter à la gueule d'un moment à l'autre du coup ils serrent les fesses...
La techno est un pur produit de l'intelligence extra-terrestre.
Diffusée sur terre elle nous familiarise avec l'inéluctable...
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