NADA !

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Modérateur : drÖne

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konsstrukt
Panzer Kontorsion
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Enregistré le : 26 juil. 2003, 01:39
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NADA !

Message par konsstrukt »

nous lacherons nos bombes comme on fait des enfants
nous les regarderons tomber longtemps et siffler
en espérant pour elles une fin grandiose
ton enfant finiras juge ou avocat et celui-là sera médecin celui-là chercheur et celui-là professeur d'université celui-là un artiste reconnu et celui-ci un riche homme d'affaire
des bombes sur les écoles et dans les universités et partout ailleurs les bombes sont comme dieu les bombes sont le grand égalisateur les bombes ne choisissent pas les bombes ne jugent pas les bombes n'excluent personne
les bombes sont bien plus justes que sarkozy bien plus justes que chirac et bien plus justes que tous les autres
les bombes sont nos enfants parfaits
les bombes ne nous décevront jamais
il faut aimer les bombes et éprouver du bonheur à les voir s'épanouir

en bas de mon immeuble il y a un salon de coiffure
je me demande souvent quel serait le décor après la chute à vitesse fixe de cinq cent kilos de métal et de poudre explosive
comment seraient les corps
comment seraient les coiffures
est-ce qu'on ferait la différence entre les têtes des gens et les têtes en plastique qui portent les perruques
et qui pleurerait-on
combien de temps on mettrait à savoir qui est mort là-dedans
voilà un bon indicateur du lien social
il y a ceux qui meurent et trente minutes après ça fait un flash spécial à la télé et il y a ceux qui meurent et il faut trois semaines pour s'en rendre compte
dans ce salon de coiffure personne ne ferait la une des journaux et il faudrait du temps pour reconnaître les morceaux les bombes sont nos enfants
il faut bien les aimer

***

nous sommes morts et vous êtes vivants
et nous allons venir vous prendre
nous sommes les cadavres
nous sommes tout autour de vous
nos bras ne sont plus que des os
et nos yeux ne sont plus que des trous
nos dents ne sont plus que des caries
et nos mains ne sont plus que des griffes
ça fait tellement longtemps que nous ne courrons plus
et tellement longtemps que nous ne marchons plus
nous rampons
nous rampons depuis trente ans
nous rampons depuis tous les trous que vous pouvez imaginer
et nous rampons vers vous
nous occupons déjà vos rues
nous occupons déjà vos routes
nous occupons les lieux où vous avez peur d'aller
nous sommes sur les places désertes
nous sommes sur les parkings
nous sommes dans les immeubles abandonnés
nous sommes la nuit
et nous rampons vers vous
nous sommes déjà en bas de vos immeubles
et en bas de vos voitures
nous vous lorgnons de nos yeux morts
quand vous passez devant nous pour aller travailler
nous passons nos langues pourries sur nos lèvres pourries
quand vous sortez des magasins avec vos caddies pleins
et ça vous ne le voyez pas
bientôt nous serons dans vos escaliers
et bientôt devant vos portes
bientôt il vous faudra nous enjamber
mais vous en prendrez l'habitude
vous sentirez nos crocs puants s'enfoncer dans votre chair propre
et ça aussi vous en prendrez l'habitude
un jour nous serons dans vos maisons
dans vos maisons ça sentira la mort
et ça aussi vous en prendrez l'habitude
vos enfants porteront sur leur chair la trace de nos dents
et bientôt vos enfants disparaîtront
et bientôt il n'y aura plus que nous
nous, tout autour de vous
partout où vos regards se porteront
partout dans vos maisons
partout dans vos rues
partout dans vos magasins
et dans tout ce que vous nommez vie
nous serons là
nous serons là partout
et nous serons là toujours
la mort aura gagné
et gagnera toujours


***

nous rampons hors des tombes
nous rampons hors des hôpitaux
nous rampons hors des boites
nous rampons hors des prisons
vous venons nous venger
et venger tous ceux qui n'ont pas pu venir avec nous
venger tous ceux qui n'ont sur que rester mort
nous sommes le cancer
nous sommes le sida
nous sommes la vache folle
et nous sommes l'amiante
nous sommes partout et tout autour de vous
nous formons une boue dans quoi vos pieds s'enfoncent
nous sommes un marécage
et chauqe jour le niveau monte
pieds
chevilles
genoux
hanches
épaules
et par-dessus vos têtes
nous sommes la marée qui envahit le monde
et envahit vos bronches
vous nous donnez des noms
nous sommes le cancer (pour vous)
nous sommes le sida (pour vous)
nous sommes l'insécurité (pour vous)
nous sommes l'immigration (pour vous)
nous sommes le nazisme (pour vous)
nous sommes la jeunesse (pour vous)
nous sommes la mort
nous sommes la mort
nous sommes votre passé
et vous n'avez pas de futur
nous sommes votre présent
nous sommes vos sables mouvants
et nous allons vous avaler


***

la poésie va-t-elle sauver le monde
la poésie guérit-elle des ongles incarnés
la poésie fait-elle revenir ta femme
et fait-elle ressurgir les morts
la poésie est-elle soluble dans l'eau
et dans le ricard
et dans la chaux vive
la poésie est-elle à l'épreuve des balles
la poésie flotte-t-elle dans le rhone
et dans l'eau des chiottes
et dans la vologne
la poésie se noie-t-elle dans la merde
la poésie part-elle en vacances
en espagne ou ailleurs
la poésie mange-telle de la merde
la poésie est-elle végétarienne
la poésie est-elle pédophile
ou nécrophile
la poésie se masturbe-t-elle en public
la poésie pue-t-elle de la gueule
est-ce que la poésie se lave les dents trois fois trois minutes chaque jour
est-ce que la poésie change de chaussettes
est-ce que la poésie voyage en seconde classe
ou bien en première
la poésie aime-t-elle les animaux
la poésie est-elle de gauche ou de droite
la poésie vote-t-elle
la poésie est-elle pour la démocratie
la poésie bande-t-elle
la poésie souffre-t-elle de migraines
la poésie a-t-elle la gueule de bois
la poésie essaie-t-elle d'arrêter de fumer
la poésie est-elle remboursée par la sécu
la poésie a-t-elle des effets secondaires
la poésie sucre-t-elle le café
est-ce que la poésie est un répondeur
est-ce que la poésie est un fax
est-ce que la poésie marche à pile ou sur secteur
combien de temps la garantie dure-t-elle
la poésie résiste-t-elle aux intempéries
et aux écarts de températures
et aux variations d'humidité
la garantie couvre-t-elle les catastrophes naturelles
y compris terrorisme et accidents nucléaires
la poésie est-elle soluble dans le zyclon
la poésie supporte-t-elle le silence


***

nos enfants nous font peur quand on les croise dans la rue
dans leurs yeux on voit la haine
et dans leurs poches des couteaux
on change de trottoir quand on croise nos enfants
dans notre ventre des boules de crainte
est-ce qu'ils vont me violer
est-ce qu'ils vont m'attaquer
où vont-ils simplement
m'insulter
nos enfants n'ont pas douze ans
ce monde leur appartient
ce monde ils l'ont conquis
ils ont su comment faire
ils l'ont conquis par la peur
de cette peur que les chiens donnent aux autres chiens
nos enfants sont les chiens
errants et dominants
de ce monde de laisses
et de museaux bouclés
laissons-leur trois générations
ils redeviendront loups
et nous ne deviendronsrien
nous leur avons appris à ne plus obéir
à ne pas accepter
à ne pas avoir peur
alors il ont compris la seule chose à comprendre
que celui qui ordonne n'obéira jamais
que celui qui domine ne tolèrera rien
que ceux qui terrorisent ne craignent pas la peur
nous leur avons appris
que dans ce monde-ci
seuls les plus forts vivaient
ils ont compris l'idée
et ils sont devenus tellement forts
que quand nous les croisons
ces chiens-loups de douze ans
nous changeons de trottoirs
nous baissons les yeux
et nous nous demandons
quel genre de couteau
dissimule sa poche
nous avons eu l'orgueil
de nous croire des hommes
de nous croire au-dessus
de la loi de la meute
nous leur avons offert la seule liberté
la liberté morale
nous leur avons offert
presque dès la naissance
la belle la blanche anomie
ils ont pris le cadeau
et cette main tendue
leurs dents l'ont lacérée
et lorsque nous croisons
ces nouvelles meutes
nous changeons de trottoirs
nous regardons les autres
ceux qui sont comme nous
ceux qui vivent dans la peur
et comprenons enfin
que nous sommes tout seul
face aux meutes d'enfants
nous changeons de trottoirs
en priant pour leur mort
mais nous savons très bien
que c'est nous qui mourrons



***

j'ai du mal à dormir
les immigrés travaillent
j'ai du mal à dormir
les immigrés s'entassent
dans les halls des préfectures pour mendier des papiers
j'ai du mal à dormir
les rmistes et les handicapés
encombrent les locaux des caf
j'ai du mal à dormir
les mendiants s'gglutinent dans les rues commerçantes
et les racailles envahissent les entrées de leurs hlm pourris
j'ai du mal à dormir
mais un jour j'entendrai le bruit des fusils d'assaut
ce seront les immigrés qui attaqueront les usines pour piquer la caisse
un jour j'entendrai le fracas des vitrines et le hurlement des alarmes
ce seront les chômeurs et les handicapés qui braqueront les banques et tous les magasins
et un jour je verrai ma porte sortir de ses gonds
un jour je verrai
les clodos et les zonards et les lascars envahir mon salon
un jour je verrai
leur couteau qui ouvre ma gorge
leur couteau déjà rouge du sang de mes voisins
un jour je verrai
mon corps se vider de mon sang
et les tox se piquer
assis dans mon divan en matant la télé
un jour je verrai
les sdf chier sur le poil ras de mon tapis ikéa
et se torcher avec les pages de mes inrockuptibles
un jour je verrai
les chômeurs longue durée faire les poches de mon cadavre
un jour je verrai ça
et ce jour-là enfin
enfin je dormirai
(mais là je n'ai plus le temps de penser plus le temps de rêver plus le temps de me branler comme un con sur la fin du monde il faut que je me couche il faut que je dorme il faut que demain je sois reposé demain j'ai rendez-vous à l'anpe demain je dois passer à la caf pour mon rmi demain)


***

tire !
tire enculé !
moi je te louperai pas !
je loupe jamais les pédés comme toi !
tu crois me faire peur avec ton casque de merde ?
oui tu me fais peur
toi aussi tu as peur
on a peur tous les deux
tous les deux on sent la merde
et nos merdes sentent pareil
c'est pas ça qui m'empêchera
de mettre ma baïonette dans ton bide
de mettre ma queue dans la chatte de ta femme
de lui couper la tête après lui avoir déchiré le cul
j'ai des ordres
je dois te faire mal
je dois te tuer
j'ai pas de pensée
j'ai un fusil
je te pisse à la raie
je vais te tuer
sale bâtard d'étranger
sale métèque aux yeux pas comme moi
sale enculé de juif
sale enculé de nègre
sale enculé de bougnoule
sale enculé de niakoué
sale enculé de bâtard de salopard d'ennemi
je vais te tuer
je vais ouvrir le ventre de tes gosses
je vais violer ta femme devant tes parents
je vais foutre le feu à tes parents
je vais foutre le feu à ta maison
ton pays maintenant c'est le mien
ton pays maintenant c'est une bouche grande ouverte
qui aimerait bien crier mais ma bite prend toute la place
tu vas tirer sale bâtard ?
t'attends quoi la fin de la guerre ?
moi je tire et toi t'es mort
et à la fin de la guerre j'ai une médaille
j'ai violé ta femme
j'ai violé ta fille
j'ai violé ta mère
j'ai violé ta mémoire
ça vaut bien une croix de guerre
ça vaut bien des vacances
ça vaut bien la culotte mouillée des filles à qui je raconte ça
dans les bars où je traîne
ça vaut bien mes doigts dans leurs culottes mouillées
mes doigts qui pressent des détentes
ma main qui sait si bien saluer
ma bouche habituée à gueuler
alors tu vas tirer sale pédé d'étranger ?
bannnnnnnggggggggggggg


***

je suis la guerre
je suis la loi
quand mon ventre s'ouvre des villages brûlent
je suis l'ordre
je suis la marche du monde
je tends un doigt vers toi et tu meurs
je suis la guerre
je suis le pouvoir
je suis celui qui t'écrase
je suis celui qui t'humilie
je suis le monstre incontrôlable
je suis ton enfant
je parle la même langue que toi
mais je la parle pour t'humilier
je suis ton enfant
mais tu ne me reconnais plus
je suis ton enfant
mais je ne te reconnais pas
je suis ton enfant
mais tu chies de peur devant moi
tu te planques comme un chien
moi je marche droit
je tends le doigt et tes tripes se brisent
j'ouvre mon ventre et ta maison brûle
cette maison où je suis né
cette maison que tu aimes plus que toi-même
cette maison que je détruirai
cette maison où tu crèveras
je suis ton enfant et je te colle contre le mur
je suis ton enfant et je te roue de coups
je suis ton enfant et tu as peur de moi
je suis ton enfant et tu me regrettes
je suis la puissance
je suis celui qui marche droit
je suis celui qui n'a pas peur
je suis celui qui n'a pas mal
je suis là pour te détruire
je suis là pour t'arracher de la terre
je suis là pour te faire pleurer
je suis là pour te faire gémir
je suis ton enfant et tu as peur de moi
je suis ton enfant et tu ne comprends pas
comment j'ai pu devenir ça
tu m'entends et tu as peur
tu me vois et tu as mal
tu me touche et tu tombes mort
j'ouvre mon ventre et les routes où tu fuies
elles explosent dans les flammes
ceux qui survivent ne m'oublient jamais
ceux qui survivent je les tue dans leurs rêves
ceux qui survivent je les tue dans leur mémoire
ceux qui survivent ne connaissent que la honte
ceux qui survivent ne connaissent que le chagrin
ils pensent à leurs amis et ils pleurent
ils pensent à leurs maisons et ils pleurent
ils pensent à leur avenir et ils pleurent
ils pensent à moi qui suis leur enfant
qui suis votre enfant à tous
et ils ont honte
ayez honte
ayez peur
ayez mal
mourrez
mourrez
je suis là
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