Léda et le cygne

ledaLéda et le cygne (qui n’est autre que ce polisson de Zeus)

Par Le Lion Bleuflorophage

Les représentations des conquêtes amoureuses de Zeus dans la peinture classique profitent des contraintes pragmatiques imposées par la métamorphose du Dieu en animal pour éviter absolument toute précision dans l’évocation de la nature des interactions comportementales entre Zeus-taureau, Zeus-cygne, et ses fiancées.

La plupart du temps, les belles se contentent de caresser d’un air extasié le plumage ou le pelage du bel animal. L’artiste est réaliste dans la représentation du rapport affectif traditionnel de l’homme à l’animal, il s’efforce sans jamais beaucoup de succès de nous faire prendre un comportement typique des relations les plus ordinaires entre l’homme et animal pour un prélude amoureux à d’autres interactions dont la représentation est laissée à la responsabilité de l’imagination du spectateur. Ce dernier ne se donne pas cette peine, aucun désir d’identification romantique ne pouvant surgir d’une réactivation des archétypes des rapports affectueux entre le toutou ou le coco et son maître gaga.

Le merveilleux, qui de ce fait est ne peut qu’être totalement absent de l’interaction proprement dite, se réfugie dans des contextes surchargés de décors, personnages secondaires et d’éléments symboliques qui rappellent que la scène est toute autre chose que ce qu’elle semble représenter, sur le mode du “et vous n’avez encore rien vu”.

Mais dans la maison de Pilate à Séville, dans un couloir frais et ombragé entre deux jardins, depuis des siècles, Léda et son cygne ont trouvé comment dépasser ces contraintes pour enfin faire autre chose que de suggérer l’immensité du gouffre entre la caresse à un animal familier – fut-elle enrobée d’expressions extatiques – et l’union amoureuse entre Zeus et son amante. L’artiste a saisi par un trou de serrure le moment exact où l’on voudrait enfin s’imaginer à la place de Léda ou du cygne. Nous sommes dans la presse people de l’Olympe, et c’est le même rire que celui de ces dieux farceurs, indiscrets, passionnés, impulsifs, qui franchit la barrière de nos dents devant le spectacle volé à Zeus et Léda puis revolé par des milliers d’instamatics.

Le Lion Bleuflorophage

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mer Mar 25 , 2009